Peut-on invoquer un droit à l’erreur pour échapper à un redressement URSSAF ?

URSSAF – Droit à l’erreur

 

 



Pas de droit à l’erreur au titre de l’obligation de vigilance

L’article L.123-1 du code des relations entre le public et l’administration, dispose :

« Une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne peut faire l’objet, de la part de l’administration, d’une sanction, pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d’une prestation due, si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l’administration dans le délai que celle-ci lui a indiqué.

La sanction peut toutefois être prononcée, sans que la personne en cause ne soit invitée à régulariser sa situation, en cas de mauvaise foi ou de fraude.

Les premier et deuxième alinéas ne sont pas applicables :

1° Aux sanctions requises pour la mise en œuvre du droit de l’Union européenne ;

2° Aux sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l’environnement ;

3° Aux sanctions prévues par un contrat ;

4° Aux sanctions prononcées par les autorités de régulation à l’égard des professionnels soumis à leur contrôle. »

 

Ces dispositions ne sont pas applicables à la solidarité financière dans la mesure où d’abord le manquement du donneur d’ordre à son obligation de vigilance ne peut pas s’analyser en une erreur, ce dernier connaissant ou devant connaître son obligation légale qui est précise et sans ambiguïté, ensuite la solidarité financière du donneur d’ordre ne peut pas s’analyser en une sanction pécuniaire ou en la privation de tout ou partie d’une prestation due, et enfin les retards et omissions de déclaration ou de diligences dans les délais prescrits par un texte ne sont plus régularisables à l’issue desdits délais.

En effet, le dispositif de la vigilance du donneur d’ordre en matière de sous-traitance et de régularité de son cocontractant au regard de ses obligations fiscales et sociales a été créé en 1994 et est régulièrement publié au Journal Officiel. Les textes codifiés donnent une liste précise et exhaustive des documents devant être obtenus par le donneur d’ordre en fonction des situations respectives du donneur d’ordre et du sous-traitant. Aucune de ces exigences légales n’est ambiguë, imprécise ou susceptible d’induire un donneur d’ordre en erreur. Le donneur d’ordre, qui allègue avoir recours à des sous-traitants depuis 44 ans, avait ou aurait dû avoir connaissance de son obligation de vigilance.

En outre, dans le cas de la solidarité financière, le donneur d’ordre qui s’est acquitté du paiement des sommes dues par son sous-traitant dispose d’une action récursoire à l’encontre du débiteur principal, soit en la personne morale, soit en celle de son gérant. Cette solidarité ne revêt donc pas le caractère d’une sanction au sens administratif.

Enfin, le devoir de vigilance étant prescrit à date précise, à savoir à la date de signature du contrat et tous les six mois jusqu’à la fin de son exécution, un manquement à ce devoir n’est pas susceptible de régularisation a posteriori[1].

Le cotisant qui n’a pas pris l’initiative de régulariser sa défaillance dans l’obtention de l’attestation de vigilance, ne peut invoquer ces dispositions[2].

Pas de droit à l’erreur pour l’octroi d’une exonération de charges sociales

L’octroi d’une exonération de charges sociales n’entre pas dans les prévisions de l’ article L.123-1 du code des relations entre le public et l’administration qui concerne les erreurs ayant eu pour conséquence de priver leur auteur de tout ou partie d’une prestation ou de lui faire subir une sanction pécuniaire[3].

Droit à l’erreur pour les cotisants qui corrigent leurs erreurs

Le décret n° 2019-1050 du 11 octobre 2019 a institué au bénéfice des contribuables un droit à l’erreur applicable pour les contrôles effectués après le 1er janvier 2020[4].

Au visa de l’article R. 243-10 du code de sécurité sociale, un droit à l’erreur est ainsi consacré au cotisant de bonne foi, ce qui caractérise un cotisant qui a rectifié son erreur immédiatement après s’en être aperçu[5],

L’article R. 243-10 du code de sécurité sociale dispose :

« I.-L’employeur corrige de sa propre initiative ou à la demande de l’organisme de recouvrement dont il relève, lors de l’échéance déclarative la plus proche, les erreurs constatées dans ses déclarations de cotisations et de contributions sociales et verse à la même échéance le complément de cotisations et de contributions sociales correspondant.

Les sommes versées indûment sont déduites du montant des cotisations et contributions à échoir, sauf demande de remboursement.

II.-Sauf en cas d’omission de salariés dans la déclaration ou d’inexactitudes répétées du montant des rémunérations déclarées, les majorations de retard et les pénalités prévues à l’article R. 243-13 et à l’article R. 243-16 ne sont pas applicables aux erreurs corrigées dans les conditions prévues au I si l’une des conditions suivantes est remplie :

1° La déclaration rectifiée et le versement de la régularisation correspondant au complément de cotisations et de contributions sociales mentionné au I sont adressées au plus tard lors de la première échéance suivante celle de la déclaration et du versement initial ;

2° Le montant des majorations et pénalités qui seraient applicables est inférieur à la valeur mensuelle du plafond de la sécurité sociale ou le versement régularisateur est inférieur à 5 % du montant total des cotisations initiales. »

Lorsque les conditions de l’article R. 243-10 du code de sécurité sociale ne sont pas réunies, le cotisant n’est pas fondé à invoquer le droit à l’erreur pour faire échec au redressement opéré[6].

[1] Cour d’appel de Paris – Pôle 06 ch. 12 1 octobre 2021 / n° 16/06337

[2] Cour d’appel d’Amiens – 2eme protection sociale 17 novembre 2022 / n° 21/02890

[3] Cour d’appel de Paris – Pôle 06 ch. 13 24 septembre 2021 / n° 18/13747

[4] Cour d’appel de Rennes – 9ème Ch Sécurité Sociale 28 juin 2023 / n° 20/05585

Cour d’appel d’Amiens – 2eme protection sociale 22 mai 2023 / n° 21/02340

[5] Cour d’appel d’Aix-en-Provence – Chambre 4-8 28 mars 2023 / n° 21/18130

[6] Cour d’appel d’Orléans – ch. sécurité sociale 26 avril 2022 / n° 199/2022

 

 




 

Eric ROCHEBLAVE – Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale

 Eric ROCHEBLAVE
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Parcours, succès judiciaires, avis clients, revue de presse…

Avocat Montpellier Eric ROCHEBLAVE

Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
https://www.rocheblave.com/

Lauréat de l’Ordre des Avocats
du Barreau de Montpellier

Lauréat de la Faculté
de Droit de Montpellier

DESS Droit et Pratiques des Relations de Travail
DEA Droit Privé Fondamental
DU d’Études Judiciaires
DU de Sciences Criminelles
DU d’Informatique Juridique

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