Pharmacie contrôlée par la CPAM : l'indu est annulé si la caisse ne justifie pas de l'agrément de ses agents usant du droit de communication
💊 Pharmacie contrôlée par la CPAM : quand votre défense par un avocat remet vos droits au centre du jeu
A l'issue d'un contrôle d'activité, la CPAM peut réclamer des indus et infliger des pénalités financières.
Les montants sont parfois lourds. Les conclusions, déjà écrites.
Mais derrière ces chiffres, il y a un principe fondamental :
➡️ un contrôle d'activité d'un professionnel de santé n'a de valeur que s'il est légalement mené.
Or, dans bien des dossiers, la caisse oublie l'essentiel :
⚖️ ses agents doivent être agréés et assermentés pour user du droit de communication prévu par le Code de la sécurité sociale.
Sans cette preuve, leur contrôle est irrégulier.
Et les décisions qui en découlent — indu et pénalité financière — sont nulles.
C'est précisément ce qu'a jugé un Tribunal saisi dans une affaire récente :
la CPAM n'ayant pas justifié de l'agrément de ses agents, l'indu a été annulé.
🎯 Le message est clair :
un contrôle ne peut pas reposer sur des agents dépourvus d'agrément et d'habilitation.
📚 Le droit de la sécurité sociale n'est pas une simple formalité :
c'est une véritable garantie des droits de la défense des professionnels de santé.
👨⚖️ Maître Eric ROCHEBLAVE
Avocat Spécialiste en Droit du travail et en Droit de la Sécurité sociale
🩺 Défense des pharmaciens et professionnels de santé face aux contrôles de la CPAM
📞 Consultation téléphonique sur rocheblave.fr
Lorsqu'une CPAM contrôle une pharmacie, elle peut réclamer un indu et infliger une pénalité financière en cas d'anomalies de facturation.
Mais encore faut-il que ce contrôle soit régulier en droit.
Si la caisse ne prouve pas que les agents usant du droit de communication étaient agréés et assermentés, la procédure est irrégulière.
Dans ce cas, le tribunal peut annuler l'indu et la pénalité financière, privant ainsi la CPAM du fondement même de son redressement.
À la suite du contrôle d'activité de votre Pharmacie et après avoir relevé diverses anomalies, la caisse primaire d'assurance-maladie vous a notifié un indu et une pénalité financière.
Votre recours devant la commission de recours amiable a échoué.
Par requêtes vous pouvez saisir le pôle social du tribunal judiciaire de votre contestation de l'indu et de la pénalité financière y afférente.
Vous pouvez peut-être reprocher à la CPAM que lors de la procédure de contrôle d'activité de votre Pharmacie, la caisse primaire d'assurance-maladie a mis en œuvre le droit de communication sur le fondement des articles L. 114-19 et L. 114- 20 du code de la sécurité sociale alors que :
- ses agents n'apparaissent ni agréés ni assermentées et que la caisse ne produit aucun élément de preuve en sens contraire.
- La CPAM ne vous a pas informé de l'usage du droit de communication
L'article L. 114-19 du code de la sécurité sociale dispose :
« Le droit de communication permet d'obtenir, sans que s'y oppose le secret professionnel, les documents et informations nécessaires :
1° Aux agents des organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale pour contrôler la sincérité et l'exactitude des déclarations souscrites ou l'authenticité des pièces produites en vue de l'attribution et du paiement des prestations servies par lesdits organismes ;
2° Aux agents chargés du contrôle mentionnés aux articles L. 243-7 du présent code et L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime pour accomplir leurs missions de contrôle définies aux mêmes articles et leur mission de lutte contre le travail dissimulé définie aux articles L. 8271-7 à L. 8271-12 du code du travail (1) ;
3° Aux agents des organismes de sécurité sociale pour recouvrer les prestations versées indûment ou des prestations recouvrables sur la succession ;
4° Aux agents des organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 du présent code et à l'article L. 725-3 du code rural et de la pêche maritime pour le recouvrement des créances relatives à une infraction aux interdictions de travail dissimulé mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail ;
5° Aux directeurs et aux directeurs comptables et financiers des organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 du présent code et aux agents placés sous leur autorité pour accomplir les actions de contrôle et de lutte contre la fraude mentionnées à l'article L. 114-9.
Le droit prévu au premier alinéa peut porter sur des informations relatives à des personnes non identifiées, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Les données ainsi obtenues par les organismes mentionnés à l'article L. 213-1 du présent code et les organismes mentionnés à l'article L. 723-2 du code rural et de la pêche maritime peuvent, au titre de l'accomplissement de leurs missions de contrôle et de lutte contre le travail dissimulé, faire l'objet d'une interconnexion avec les données dont ces mêmes organismes disposent. Les modalités de l'interconnexion sont définies par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
Le droit prévu au premier alinéa s'exerce quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents et peut s'accompagner de la prise immédiate d'extraits et de copies.
Les documents et informations sont communiqués à titre gratuit, par voie dématérialisée sur demande de l'agent chargé du contrôle ou du recouvrement, dans les trente jours qui suivent la réception de la demande.
Le silence gardé ou le refus de déférer à une demande relevant du premier alinéa du présent article est puni d'une pénalité de 1 500 € par cotisant, assuré ou allocataire concerné, sans que le total de la pénalité puisse être supérieur à 10 000 €.
Le silence gardé ou le refus de déférer à une demande relevant du septième alinéa du présent article est puni d'une pénalité de 5 000 €. Cette pénalité s'applique pour chaque demande, dès lors que tout ou partie des documents ou renseignements sollicités n'est pas communiqué.
Ces montants sont doublés en cas de récidive de refus ou de silence gardé du tiers dans le délai de cinq ans à compter de l'expiration du délai de trente jours octroyé au tiers pour faire droit à la première demande de l'organisme de sécurité sociale. »
L'article R. 114-18 du Code de la sécurité sociale précise,
« I.-Les agents chargés du contrôle, assermentés et agréés, des organismes locaux d'assurance maladie mentionnés à l'article L. 114-10 procèdent à toutes vérifications sur pièces et sur place portant sur l'exactitude des déclarations, attestations et justificatifs de toute nature fournis par les assurés sociaux en vue de bénéficier ou de faire bénéficier des prestations servies au titre des assurances maladie, maternité, accidents du travail, maladies professionnelles, invalidité, décès, de la protection complémentaire en matière de santé, de l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé ou de l'aide médicale de l'Etat.
II.-Lorsque les vérifications portent sur le droit aux prestations calculées en fonction des revenus déclarés ou aux prestations versées sous conditions de ressources ou sous condition de volume de travail effectué, les agents susmentionnés peuvent mener leurs enquêtes auprès de toute personne physique ou morale susceptible de valider les renseignements d'ordre pécuniaire fournis par l'assuré à l'appui de sa demande de prestations.
III.-Lorsque les vérifications portent, en application de l'article L. 162-1-20, sur les médicaments, les dispositifs médicaux, les produits ou les prestations de service et d'adaptation associées inscrits sur les listes prévues aux articles L. 162-17 et L. 165-1, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie adresse à l'établissement de santé ou à la personne physique ou morale un avis qui mentionne la date et l'heure du contrôle, l'objet des vérifications ou de l'enquête ainsi que la possibilité pour l'établissement ou la personne physique ou morale de se faire assister du conseil de son choix pendant les vérifications ou l'enquête administrative. Cet avis transmis par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception doit parvenir au moins quinze jours avant la date de la première visite.
L'envoi de cet avis ne s'applique pas aux vérifications ou à l'enquête qui ont pour objet des faits relevant du VII de l'article L. 114-17-1.
A l'issue du contrôle sur place, les agents chargés du contrôle communiquent à l'établissement ou à la personne physique ou morale un document daté et signé conjointement mentionnant l'objet du contrôle, le nom et la qualité des agents chargés du contrôle ainsi que les documents consultés et communiqués. En cas de refus de signature par l'établissement ou la personne contrôlée, les agents susmentionnés consignent ce fait dans un procès-verbal.
IV.-Les agents chargés du contrôle peuvent, dans le cadre des investigations mentionnées aux I, II et III, réclamer à la personne physique ou morale contrôlée ou à l'établissement contrôlé la communication de tout document, ou copie de document, nécessaire à l'exercice du contrôle dès lors qu'il n'est pas porté atteinte au respect du secret médical. Dans ce dernier cas, les documents sont adressés ou remis au praticien-conseil. »
Ces dispositions réglementaires démontrent que l'article L. 114-10 a vocation à s'appliquer lorsque les organismes entendent exercer de véritables prérogatives de puissance publique.
Cependant, l'article R. 114-18 du Code de la sécurité sociale qui liste les vérifications auxquelles peuvent procéder les agents chargés du contrôle, ne mentionne pas la situation des professionnels de santé faisant l'objet d'un contrôle de facturation au regard des règles de la NGAP ou de la CCAM, et susceptible de donner lieu au recouvrement d'un indu sur le fondement de l'article L. 133-4[1].
Aux termes de l'article L 114-10 du Code de la sécurité sociale,
« Les directeurs des organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale ou du service des allocations et prestations mentionnées au présent code confient à des agents chargés du contrôle, assermentés et agréés dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale ou par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, le soin de procéder à toutes vérifications ou enquêtes administratives concernant l'attribution des prestations, le contrôle du respect des conditions de résidence et la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles. Des praticiens-conseils et auditeurs comptables peuvent, à ce titre, être assermentés et agréés dans des conditions définies par le même arrêté. Les constatations établies à cette occasion par ces agents font foi jusqu'à preuve du contraire.
Lorsque cela est nécessaire à l'accomplissement de sa mission, un agent chargé du contrôle peut être habilité par le directeur de son organisme à effectuer, dans des conditions précisées par décret, des enquêtes administratives et des vérifications complémentaires dans le ressort d'un autre organisme. Les constatations établies à cette occasion font foi dans les mêmes conditions que celles mentionnées au premier alinéa et le directeur de ce dernier organisme tire, le cas échéant, les conséquences concernant l'attribution des prestations et la tarifcation des accidents du travail et des maladies professionnelles. »
Ce texte n'est pas applicable s'agissant d'une procédure dans le cadre de laquelle aucun procès-verbal n'a été établi et qui s'est fondée exclusivement sur la comparaison de la facturation d'un professionnel de santé avec les données issues du système d'information de l'assurance maladie[2].
Le droit de communication s'inscrit nécessairement dans le cadre du contrôle mentionné à l'article L114-10 du code de la sécurité sociale, n ce qu'il constitue une vérification au sens dudit texte.
Il ne peut par conséquent qu'être réalisé par un agent assermenté[3] et il appartient à l'organisme de sécurité sociale d'en justifier.
L'absence d'agrément ou l'absence d'assermentation des agents de droit privé désignés par les caisses d'allocations familiales pour conduire des contrôles sur les déclarations des bénéficiaires du revenu de solidarité active sont de nature à affecter la validité des constatations des procès-verbaux qu'ils établissent à l'issue de ces contrôles et à faire ainsi obstacle à ce qu'elles constituent le fondement d'une décision déterminant pour l'avenir les droits de la personne contrôlée ou remettant en cause des paiements déjà effectués à son profit en ordonnant la récupération d'un indu[4].
Le Conseil d'État juge que :
« tant l'absence d'agrément que l'absence d'assermentation des agents de droit privé désignés par les caisses... pour conduire des contrôles... sont de nature à affecter la validité des constatations des procès-verbaux qu'ils établissent à l'issue de ces contrôles et à faire ainsi obstacle à ce qu'elles constituent le fondement d'une décision déterminant pour l'avenir les droits de la personne contrôlée ou remettant en cause des paiements déjà effectués à son profit en ordonnant la récupération d'un indu »[5]
La Cour de cassation, dans sa jurisprudence constante, juge que l'obligation d'agrément et d'assermentation prescrite par ce texte ne s'applique aux agents qui procèdent sur le fondement de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale au contrôle de l'application des règles de tarification ou de facturations par un professionnel de santé, que lorsqu'ils mettent en œuvre des prérogatives de puissance publique et que tel est le cas lorsqu'ils procèdent notamment à une audition et établissent des procès-verbaux de ces auditions mais également lorsque ces agents mettent en œuvre le droit de communication de l'article L. 114-19 du code de la sécurité sociale.
L'irrégularité ou l'omission de la formalité d'agrément ou d'assermentation prive les agents de leur pouvoir de contrôle, et, dès lors, entraîne la nullité de tous les actes postérieurs qui en sont la conséquence[6].
Le défaut de preuve de l'assermentation et de l'agrément des agents ayant mis en œuvre la procédure de droit de communication, telle que prescrite par l'article L.114-9 du code de la sécurité sociale, les prive de leur pouvoir de contrôle et entraîne la nullité de tous les actes qui en sont la conséquence.
Le contrôle diligenté par la caisse étant irrégulier, de sorte qu'il ne pouvait fonder les demandes en remboursement de l'indu et en paiement de la pénalité financière[7] :
« En l'espèce, il est établi par les pièces produites aux débats et non contestées par la caisse, que Mme [O] [H] a mis en oeuvre le droit de communication le 16 juillet 2018 à l'encontre de la société [4] puis a procédé à l'étude la SELARL pharmacie de l'Ariane'; que Mme [W] [L] a mis en 'uvre le droit de communication le 15 janvier 2019 à l'encontre de la société [3] et a convoqué par courrier daté du même jour, le gérant de la pharmacie de l'Ariane pour audition et qu'enfin le Docteur [Y] [C], praticien conseil, chef de service, a analysé les éléments ainsi obtenus.
Les courriers envoyés sollicitent pour la période du 1/1/2017 au 31/03/2018, soit quasiment la totalité de la période contrôlée (1er novembre 2016 au 31 septembre 2018) «'la liste détaillée des spécialités remboursables fournies à la pharmacie de l'Ariane, en indiquant les quantités et code CIP ou LPP pour chaque produit'». Le courrier précise, «'que cette demande s'inscrit dans le cadre d'investigations menées en vue de détecter une fraude'».
Or, la caisse ne produit aucun élément démontrant l'assermentation et l'agrément de ces agents, la société soutenant dans ses écritures, sans en produire la pièce, qu'il ressort du bulletin officiel du ministère de la santé et de la sécurité sociale, que Madame [O] [H] a été agréée provisoirement le 3 janvier 2022, assermentée le 10 février 2022 et définitivement agréée à cette date, soit postérieurement à la période de contrôle de la pharmacie de l'Ariane.
Le défaut de preuve de l'assermentation et de l'agrément des agents ayant mis en 'œuvre la procédure de droit de communication, telle que prescrite par l'article L.114-9 du code de la sécurité sociale, les prive de leur pouvoir de contrôle et entraîne la nullité de tous les actes qui en sont la conséquence tels que, en l'espèce, la notification des résultats du contrôle du 3 octobre 2019, la notification de l'indu du 25 novembre 2019 et la notification de la pénalité financière du 23 février 2021, qui se sont appuyés notamment sur les documents fournis dans le cadre de cette procédure de droit de communication. »
Cette situation illustre parfaitement le principe jurisprudentiel selon lequel l'habilitation des agents doit être effective au moment de l'exercice de leurs pouvoirs de contrôle. La Cour de cassation a d'ailleurs précisé dans un arrêt du 5 septembre 2024 que l'assermentation et l'agrément sont deux conditions distinctes, toutes deux nécessaires mais dont la validité s'apprécie indépendamment[8]. Dans cette décision, la Cour avait considéré que l'assermentation de l'agent était valide car il avait prêté serment à la bonne date, même si son agrément définitif était intervenu hors délai.
[1] Cour d'appel d'Orléans, 2023-07-04, n° 21/00272
[2] Cour d'appel d'Orléans, 2023-07-04, n° 21/00272
[3] rappr. CE, 8 juillet 2019, n°422162 ; Cas, Civ 2ème, 12 mai 2021, n°20-11.941
[4] rappr. CE, 25 juillet 2024, n°475613
[5] CE 1ère chambre, 26 décembre 2018, 41 7632
[6] Cass 2e civ, 7/09/2023, n°20-17.433
[7] Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2025-10-17, n° 24/01714
[8] Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 5 septembre 2024, 22-18.171
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