URSSAF : pourquoi une rupture conventionnelle peut coûter très cher à votre entreprise ?
La rupture conventionnelle est souvent perçue comme un mode de séparation amiable, souple et sécurisant pour l’employeur. Pourtant, ce dispositif peut entraîner de lourdes conséquences financières en cas de contrôle URSSAF.
Si les indemnités versées lors d’une rupture conventionnelle peuvent, sous certaines conditions, bénéficier d’exonérations sociales, celles-ci restent strictement encadrées par le Code de la sécurité sociale et le Code général des impôts.
L’URSSAF veille particulièrement à trois points sensibles :
- l’âge du salarié au moment de la rupture,
- la nature et le calendrier des indemnités versées (notamment en cas de transaction postérieure),
- l’application correcte du forfait social.
Une erreur d’appréciation, une absence de justificatif ou un oubli déclaratif peuvent suffire à déclencher un redressement, potentiellement lourd pour l’entreprise.
Rupture conventionnelle : l’URSSAF peut vous redresser si votre salarié est proche de la retraite
Aux termes de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au présent litige,
« pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire. La compensation salariale d'une perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail est également considérée comme une rémunération, qu'elle prenne la forme, notamment, d'un complément différentiel de salaire ou d'une hausse du taux de salaire horaire. (…)
Est exclue de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa, dans la limite d'un montant fixé à deux fois la valeur annuelle du plafond mentionné à l'article L. 241-3, la part des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail ou de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter du code général des impôts qui n'est pas imposable en application de l'article 80 duodecies du même code. Toutefois, les indemnités versées à l'occasion de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes mentionnées à l'article 80 ter du code général des impôts d'un montant supérieur à cinq fois le plafond annuel défini par l'article L. 241-3 du présent code sont intégralement assimilées à des rémunérations pour le calcul des cotisations visées au premier alinéa du présent article. Pour l'application du présent alinéa, il est fait masse des indemnités liées à la rupture du contrat de travail et de celles liées à la cessation forcée des fonctions ».
L'article 80 duodecies du code général des impôts, procède de la même logique puisque son alinéa 1 pose le principe que :
« 1. Toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable, sous réserve des dispositions suivantes. »
Mais il énonce ensuite plusieurs séries d'exceptions, notamment que :
« Ne constituent pas une rémunération imposable :
(…)
6° La fraction des indemnités prévues à l'article L. 1237-13 du code du travail versées à l'occasion de la rupture conventionnelle du contrat de travail d'un salarié lorsqu'il n'est pas en droit de bénéficier d'une pension de retraite d'un régime légalement obligatoire, qui n'excède pas :
a) Soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail, ou 50 % du montant de l'indemnité si ce seuil est supérieur, dans la limite de six fois le plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale en vigueur à la date de versement des indemnités ;
b) Soit le montant de l'indemnité de licenciement prévue par la convention collective de branche, par l'accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi. »
A contrario, est imposable et soumise à cotisations sociales y compris au titre de la CSG et de la l'indemnité de rupture conventionnelle d'un salarié qui est en droit de bénéficier d'une pension de retraite d'un régime légalement obligatoire.
Il est exact que la société peut rapporter librement la preuve que les salariés en cause n'auraient pu prétendre à un régime de retraite[1].
Il résulte des dispositions de l'article L.161-17-2 du code de la sécurité sociale que les personnes nées à compter du 1er janvier 1955 peuvent bénéficier d'une pension de retraite lorsqu'elles ont atteint l'âge de 62 ans.
Il existe cependant des dispositions qui permettent, sous certaines conditions, un départ en retraite anticipée par exemple pour carrière longue (article L. 351-1-1 du code de la sécurité sociale) ou pour les personnes en situation de handicap (article L. 351-1-3 du code de la sécurité sociale).
Si aucune disposition légale ou réglementaire n'impose à l'employeur qui conclut une rupture conventionnelle avec un de ses salariés de lui demander de justifier s'il est en droit de bénéficier d'une pension de retraite d'un régime légalement obligatoire, il n'en demeure pas moins qu'il est tenu de faire une juste application de la législation sociale.
A cette fin, aucune disposition ne lui interdit de demander aux salariés concernés de lui transmettre une copie d'un document attestant de leurs droits à la retraite de base afin de vérifier quel régime social est applicable à l'indemnité de rupture conventionnelle conformément aux dispositions légales susmentionnées.
Conformément aux dispositions de l'article 1353 du code civil, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve du respect des conditions de l'exonération de cotisations qu'il applique[2].
Rupture conventionnelle : les indemnités postérieures à la rupture peuvent être requalifiées par l’URSSAF
En vertu de de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations et contributions sociales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire.
Est exclue de l'assiette des cotisations, dans la limite d'un montant fixé à deux fois la valeur annuelle du plafond mentionné à l'article L 241-3, la part des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail ou de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter du code général des impôts qui n'est pas imposable en application de l'article 80 duodécies du même code.
Dans le cadre d'une transaction, seules peuvent être exclues de l'assiette des cotisations et contributions sociales, les sommes présentant le caractère de dommages-intérêts.
En cas de divergence entre l’organisme et le cotisant, il revient au juge saisi du litige d’analyser la transaction afin de faire ressortir l'intention commune précise des parties et d’en déduire le caractère indemnitaire ou salarial des sommes concernées, l’employeur supportant la charge de la preuve du caractère indemnitaire de la ou des indemnités transactionnelles versées[3].
Lorsque qu'après la conclusion d'une rupture conventionnelle, une indemnité transactionnelle est versée, sa fraction qui ne porte pas sur des éléments de salaire doit être ajourée à l'indemnité qu'elle vient compléter pour la détermination de la limite applicable en matière de cotisations et contributions sociales[4].
Forfait social sur rupture conventionnelle : un oubli peut déclencher un redressement URSSAF
Selon les dispositions de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale,
« I.- Les cotisations de sécurité sociale dues au titre de l'affiliation au régime général des personnes mentionnées aux articles L. 311-2 et L. 311-3 sont assises sur les revenus d'activité tels qu'ils sont pris en compte pour la détermination de l'assiette définie à l'article L. 136-1-1. Elles sont dues pour les périodes au titre desquelles ces revenus sont attribués.
II.- Par dérogation au I, sont exclus de l'assiette des cotisations de sécurité sociale :
7° Dans la limite de deux fois le montant annuel du plafond défini à l'article L. 241-3 du présent code, les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail ou de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes mentionnées à l'article 80 ter du code général des impôts qui ne sont pas imposables en application de l'article 80 duodecies du même code. Toutefois, sont intégralement assujetties à cotisations les indemnités versées à l'occasion de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes mentionnées à l'article 80 ter du même code d'un montant supérieur à cinq fois le montant annuel du plafond défini à l'article L. 241-3 du présent code, ainsi que celles versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail d'un montant supérieur à dix fois le montant de ce même plafond. En cas de cumul d'indemnités versées à l'occasion de la cessation forcée des fonctions et de la rupture du contrat de travail, il est fait masse de l'ensemble de ces indemnités ; lorsque le montant de celles-ci est supérieure à cinq fois le montant annuel du plafond défini à l'article L. 241-3, ces indemnités sont intégralement assujetties à cotisations. »
La totalité des indemnités de rupture conventionnelle doivent être soumise au forfait social[5].
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[1] Tribunal judiciaire de Lille, 2025-01-21, n° 24/02011
[2] Tribunal judiciaire de Marseille, 2025-03-25, n° 20/00751
[3] Tribunal judiciaire de Marseille, 2024-11-27, n° 23/03028
[4] Tribunal judiciaire de Lille, 2025-01-07, n° 21/02583
[5] Tribunal judiciaire de Bobigny, 2024-12-11, n° 23/01961
Eric ROCHEBLAVE - Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale
Eric ROCHEBLAVE
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Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
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Lauréat de l’Ordre des Avocats
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DEA Droit Privé Fondamental
DU d’Études Judiciaires
DU de Sciences Criminelles
DU d’Informatique Juridique
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