Salariés en arrêts maladies vous avez droit à des congés payés ! Le Code du travail est contraire au Droit européen : vous pouvez faire condamner l’Etat

A ce jour, le Code du travail ne permet pas aux salariés en arrêt maladie non professionnelle d’acquérir des congés payés, sauf dispositions conventionnelles plus favorables.

Cette situation est contraire l’article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen qui garantit à tous les salariés un minimum de quatre semaines de congés payés annuel et n’impose aucune condition de travail effectif pour acquérir des congés payés.

La Cour de justice de l’Union européenne a déjà jugé que cela interdisait dès lors aux Etats membres de l’UE de priver les salariés en arrêt maladie d’un droit à congés payés.

Cependant, cette directive doit être transposée dans le Code du travail français pour pouvoir être invoquée par les salariés devant les juridictions prud’homales à l’appui de leurs demande de congés payés suite à un arrêt maladie.

Néanmoins, il est possible d’engager la responsabilité et la condamnation de l’Etat à des dommages et intérêts pour défaut de transposition de l’article 7 de la directive 2003/88/CE dans le Code du travail

 

A lire :

Les salariés en arrêt maladie ont droit à des congés payés !

 

 




La Cour administrative d’appel de Versailles a condamné l’Etat pour défaut de transposition de l’article 7 de la directive 2003/88/CE dans le Code du travail

La responsabilité de l’Etat du fait des lois est susceptible d’être engagée en raison des obligations qui sont les siennes pour assurer le respect des conventions internationales par les autorités publiques, pour réparer l’ensemble des préjudices qui résultent de l’intervention d’une loi adoptée en méconnaissance des engagements internationaux de la France.

La transposition en droit interne des directives européennes, qui est une obligation résultant du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, revêt, en outre, en vertu de l’article 88-1 de la Constitution, le caractère d’une obligation constitutionnelle. Il appartient dès lors au juge national, juge de droit commun de l’application du droit de l’Union européenne, de garantir l’effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l’égard des autorités publiques.

Aux termes de l’article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, qui reprend les termes de l’article 7 de la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 dont la directive 2003/88/CE procède à la codification :  » Congé annuel 1. Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins quatre semaines, conformément aux conditions d’obtention et d’octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales. 2. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail. « .

Aux termes de l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne :  » () 2. Tout travailleur a droit à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu’à une période annuelle de congés payés. « .

Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, et notamment de ses arrêts du 20 janvier 2009 ( C-350/06 et C-520/06, Schultz-Hoff et autres) et du 24 janvier 2012 ( C-282/10, B C), que le droit au congé annuel payé de chaque travailleur doit être considéré comme un principe du droit social de l’Union revêtant une importance particulière, auquel il ne saurait être dérogé et dont la mise en œuvre par les autorités nationales compétentes ne peut être effectuée que dans les limites expressément énoncées par la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993, codifiée par la directive 2003/88/CE.

Il en résulte également, et en particulier d’un arrêt du 26 juin 2001 (C 173/99 Broadcasting, Entertainment, Cinematographic and Theatre Union) que la directive doit être interprétée en ce sens, d’une part, qu’elle fait obstacle à ce que les États membres limitent unilatéralement le droit au congé annuel payé conféré à tous les travailleurs, en appliquant une condition d’ouverture de ce droit qui aurait pour effet d’exclure certains travailleurs du bénéfice de ce dernier et, d’autre part, qu’elle s’oppose à des dispositions ou à des pratiques nationales qui prévoient que le droit au congé annuel payé est subordonné à une période de travail effectif minimale pendant la période de référence.

Le délai de transposition de l’article 7 de la directive 2003/88/CE, qui procède à la codification de la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 dont le délai de transposition expirait le 23 novembre 1996, expirait lui-même le 23 mars 2005.

Le droit au congé payé est par ailleurs consacré à l’article 31, paragraphe 2, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, à laquelle l’article 6, paragraphe 1, du traité sur l’Union européenne reconnaît la même valeur juridique que les traités.

Ainsi que l’a jugé la Cour de justice de l’Union européenne par un arrêt du 6 novembre 2018 (C-569/ 16 Stadt Wuppertal c/ Bauer et C- 570/16 Willmeroth c. Brossonn), l’article 31, paragraphe 2, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne se suffit à lui-même pour conférer aux travailleurs un droit invocable en tant que tel dans un litige qui les oppose à leur employeur dans une situation couverte par le droit de l’Union et relevant, par conséquent, du champ d’application de la Charte.

En premier lieu, aux termes de l’article L. 3141-5 du code du travail :  » Sont considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé : 1° Les périodes de congé payé ; / 2° Les périodes de congé de maternité, de paternité et d’accueil de l’enfant et d’adoption ; /3° Les contreparties obligatoires sous forme de repos prévues aux articles L. 3121-30, L. 3121-33 et L. 3121-38 ; /4° Les jours de repos accordés au titre de l’accord collectif conclu en application de l’article L. 3121-44 ; /5° Les périodes, dans la limite d’une durée ininterrompue d’un an, pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle ;/ 6° Les périodes pendant lesquelles un salarié se trouve maintenu ou rappelé au service national à un titre quelconque. « .

D’une part, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé notamment le 24 janvier 2012 , dans l’affaire C 282/10, Mme B C contre Centre informatique du Centre Ouest Atlantique, préfet de la région Centre, que  » s’agissant de travailleurs en congé de maladie dûment prescrit, le droit au congé annuel payé conféré par cette directive à tous les travailleurs ne peut pas être subordonné par un État membre à l’obligation d’avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit État « . Il résulte de l’instruction, sans que cela soit contesté par le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion qui n’a produit aucune observation à un quelconque stade de la procédure, que le 5° de l’article L. 3141-5 du code du travail, qui assimile à des périodes de travail effectif  » Les périodes, dans la limite d’une durée ininterrompue d’un an, pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle », fait obstacle à ce qu’un salarié bénéficie d’au moins quatre semaines de congé annuel payé au-delà d’une année qu’il a passée de façon ininterrompue en situation de congé maladie d’origine non professionnelle ou de congé pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle. Ce faisant, le 5° de l’article L. 3141-5 du code du travail applique une condition d’ouverture du droit au congé payé qui a pour effet d’exclure certains travailleurs du bénéfice de ce dernier. Ceci a pour effet de rendre cette disposition incompatible, dans cette mesure, avec les dispositions de l’article 7 de la directive 2003/88/CE, qui doivent être interprétées strictement.

D’autre part, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé dans l’affaire Mme B C contre Centre informatique du Centre Ouest Atlantique, préfet de la région Centre au point 6 ci-dessus, que  » la directive 2003/88 n’opérant aucune distinction entre les travailleurs qui sont absents du travail en vertu d’un congé de maladie, pendant la période de référence, et ceux qui ont effectivement travaillé au cours de ladite période (voir arrêt Schultz-Hoff e.a., précité, point 40), il s’ensuit que, s’agissant de travailleurs en congé de maladie dûment prescrit, le droit au congé annuel payé conféré par cette directive à tous les travailleurs ne peut pas être subordonné par un État membre à l’obligation d’avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit État. De telles dispositions sont incompatibles, dans cette mesure, avec les stipulations citées plus haut du paragraphe 1 de l’article 7 de la directive n° 2003/88/CE, qui font obstacle à toute distinction en fonction de l’origine de l’absence du travailleur en congé de maladie, dûment prescrit « . Dès lors qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 3141-3, y compris dans leur rédaction en vigueur à la date du présent arrêt, et L. 3141-5 du code du travail, que ne sont pas considérées comme des périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé payé les périodes pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause de maladie d’origine non professionnelle, et qu’elles procèdent ce faisant à une distinction entre les périodes de suspension du contrat du travail selon leur origine professionnelle ou non-professionnelle, le 5° de l’article L. 3141-5 du code du travail introduit une restriction à la naissance du droit au congé payé pourtant garanti par l’article 7 de la directive 2003/88/CE.

La Cour administrative d’appel de Versailles[1] a considéré que la Confédération Générale du Travail, la Confédération Générale du Travail Force ouvrière, et l’Union syndicale Solidaires sont donc fondées à soutenir que les dispositions du 5° de l’article L. 3141-5 du code du travail sont, en tant qu’elles introduisent les restrictions exposées aux points 7 et 8 du présent arrêt, incompatibles avec l’article 7 de la directive 2003/88/CE, tel qu’interprété par la Cour de justice de l’Union européenne, à la date de son arrêt.

En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 3141-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, régissant les salariés présents à l’effectif d’une entreprise avant l’entrée en vigueur des modifications apportées à cet article par la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 applicables aux salariés présents à l’effectif de l’entreprise à compter du 1er juin 2012, conformément au II de l’article 50 de ladite loi,  » Le salarié qui justifie avoir travaillé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum de dix jours de travail effectif a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail.() « .

La Cour de justice de l’Union européenne a jugé dans l’affaire Mme B C contre Centre informatique du Centre Ouest Atlantique, préfet de la région Centre citée au point 7 ci-dessus que  » le droit au congé annuel payé conféré par cette directive à tous les travailleurs ne peut pas être subordonné par un État membre à l’obligation d’avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit État (arrêt Schultz-Hoff e.a., précité, point 41). Il découle de ce qui précède que l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2003/88 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à des dispositions ou à des pratiques nationales qui prévoient que le droit au congé annuel payé est subordonné à une période de travail effectif minimale de dix jours ou d’un mois pendant la période de référence « . En imposant un temps de travail effectif minimum de dix jours, les dispositions précitées de l’article L. 3141-3 du code du travail n’ont pas permis à l’ensemble des salariés d’une entreprise de bénéficier du droit au congé payé d’au moins quatre semaines et ont donc apporté des restrictions au droit au congé payé incompatibles avec l’article 7 de la directive 2003/88/CE et contraires à l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et ce jusqu’à l’application de la version du même article résultant de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012.

En troisième lieu, aux termes de l’article L. 3141-26 du code du travail, dans sa rédaction applicable jusqu’au 4 mars 2016, avant que ne prenne effet la déclaration d’inconstitutionnalité des mots  » dès lors que la rupture du contrat de travail n’a pas été provoquée par la faute lourde du salarié «  prononcée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2015-523 QPC du 2 mars 2016 :  » Lorsque le contrat de travail est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il reçoit, pour la fraction de congé dont il n’a pas bénéficié, une indemnité compensatrice de congé déterminée d’après les dispositions des articles L. 3141-22 à L. 3141-25./ L’indemnité est due dès lors que la rupture du contrat de travail n’a pas été provoquée par la faute lourde du salarié, que cette rupture résulte du fait du salarié ou du fait de l’employeur./ Cette indemnité est également due aux ayants droit du salarié dont le décès survient avant qu’il ait pris son congé annuel payé. L’indemnité est versée à ceux des ayants droit qui auraient qualité pour obtenir le paiement des salaires arriérés. « 

La Cour de justice de l’Union européenne a jugé dans des affaires jointes C-569/16 et C-570/16 du 6 novembre 2018, Stadt Wuppertal contre Maria Elisabeth Bauer (C-569/16), et Volker Willmeroth, en sa qualité de propriétaire de TWI Technische Wartung und Instandsetzung Volker Willmeroth eK contre Martina Broßonn (C-570/16)que  » Le paiement du congé prescrit à l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2003/88 vise à permettre au travailleur de prendre effectivement le congé auquel il a droit (arrêt du 16 mars 2006, Robinson-Steele e.a., C-131/04 et C-257/04, EU:C:2006:177, point 49).  » et que l’article 7, paragraphe 2 précité  » ne pose aucune condition à l’ouverture du droit à une indemnité financière autre que celle tenant au fait, d’une part, que la relation de travail a pris fin et, d’autre part, que le travailleur n’a pas pris tous les congés annuels payés auxquels il avait droit à la date où cette relation a pris fin (voir, en ce sens, arrêt du 12 juin 2014, Bollacke, C-118/13, EU:C:2014:1755, point 23). Ainsi le motif pour lequel la relation de travail a pris fin n’est pas pertinent pour le droit à une indemnité financière prévu à l’article 7, paragraphe 2, de la directive 2003/88 (voir, en ce sens, arrêt du 20 juillet 2016, Maschek, C-341/15, EU:C:2016:576, point 28) « . Il suit de là qu’en limitant le bénéfice pour tout salarié du droit au congé payé, en excluant ceux dont le contrat a été rompu pour faute lourde, l’article L. 3141-26 du code du travail, dans sa rédaction applicable jusqu’au 4 mars 2016, a apporté des restrictions au droit au congé payé qui sont incompatibles avec l’article 7 de la directive 2003/88/CE.

Enfin les organisations requérantes ont soutenu que le droit du travail méconnait les dispositions précitées du droit de l’Union européenne en tant, d’une part, que les articles L. 3141-3 et L. 3141-12 du code du travail, dans leur version applicable à la date du présent arrêt et telles qu’interprétées par la Cour de cassation, privent les salariés faisant usage de leur droit au congé parental de l’exercice de leurs droits à congé payé acquis durant l’année précédant la naissance de leur enfant au terme de ce congé, et en tant, d’autre part, qu’un salarié qui tombe malade durant ses congés payés ne peut pas exiger de prendre ultérieurement le congé dont il n’a pas pu bénéficier du fait de son arrêt de travail. Toutefois l’incompatibilité dont elles se prévalent procède, selon leurs propres écritures, de décisions de la chambre sociale de la Cour de cassation et notamment des arrêts rendus sur les pourvois n° 01-46314 du 28 janvier 2004 et n° 93-44907 du 4 décembre 1996, lesquels ne mentionnent ou ne visent, au surplus, que les dispositions de l’article L. 223-7 du code du travail applicables aux litiges en cause et abrogées par l’ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007. Les organisations requérantes ne développent aucune critique précise des dispositions du code du travail applicables depuis l’expiration du délai de transposition de l’article 7 de la directive 2003/88/CE, ou même de celui de la directive 93/104/CE, mais se bornent à contester l’interprétation du code du travail à laquelle se livre la Cour de cassation dans les décisions précitées, lesquelles sont au demeurant antérieures à la décision C-282/10 du 24 janvier 2012 de la Cour de justice de l’Union européenne invitant les juridictions nationales à neutraliser les dispositions nationales incompatibles avec la directive 2003/88/CE. Les requérantes ne sont donc pas fondées à soutenir que les dispositions du code du travail limiteraient ou auraient limité le droit des salariés faisant usage de leur droit au congé parental de bénéficier de leurs droits à congé payés acquis durant l’année précédant la naissance de leur enfant au terme de ce congé, pas plus que celui d’un salarié qui tombe malade durant ses congés payés d’exiger de prendre ultérieurement ledit congé. Elles ne justifient donc pas, s’agissant de ces situations, d’une méconnaissance par le code du travail de l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et de son incompatibilité avec l’article 7 de la directive n° 2003/88/CE et la directive 96/34/CE du Conseil, du 3 juin 1996 concernant l’accord-cadre sur le congé parental conclu par l’UNICE, le CEEP et la CES.

Pour la Cour administrative d’appel de Versailles, il résulte néanmoins de tout ce qui précède que les requérantes sont fondées à soutenir que l’article 7 de la directive 2003/88/CE, codifiant l’article 7 de la directive 93/104/CE, n’a pas été totalement transposé par les dispositions législatives du code du travail, qui laisse ou a laissé subsister des dispositions incompatibles vis-à-vis de cet article comme de l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Un tel retard de transposition est susceptible d’engager la responsabilité de l’Etat en réparation du préjudice moral subi de ce fait par les salariés que représentent les organisations syndicales requérantes.

Suites, la Cour administrative d’appel de Versailles a condamné l’’Etat à verser à la Confédération Générale du Travail, à la Confédération Générale du Travail Force ouvrière et à l’Union syndicale Solidaires :

  • la somme de 10 000 euros, chacune, en réparation du préjudice moral collectif des salariés qu’elles représentent.
  • la somme de 1 500 euros, chacune, au titre de l’article L 761-1 du code de justice administrative.

Le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a condamné l’Etat pour défaut de transposition de l’article 7 de la directive 2003/88/CE dans le Code du travail

D’une part, la responsabilité de l’Etat du fait des lois est susceptible d’être engagée en raison des obligations qui sont les siennes pour assurer le respect des conventions internationales par les autorités publiques, pour réparer l’ensemble des préjudices qui résultent de l’intervention d’une loi adoptée en méconnaissance des engagements internationaux de la France.

D’autre part, la transposition en droit interne des directives européennes, qui est une obligation résultant du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, revêt, en outre, en vertu de l’article 88-1 de la Constitution, le caractère d’une obligation constitutionnelle.

Il appartient au juge national, juge de droit commun de l’application du droit de l’Union européenne, de garantir l’effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l’égard des autorités publiques.

Aux termes de l’article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 relative à certains aspects de l’aménagement du temps de travail : «Congé annuel 1. Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins quatre semaines, conformément aux conditions d’obtention et d’octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales. 2. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail» ; qu’il résulte des dispositions du paragraphe 1 de l’article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, telles qu’interprétées par la Cour de justice des Communautés européennes dans son arrêt n° C-350/06 et C-520/06 du 20 janvier 2009 et son arrêt n° C-282/10 du 24 janvier 2012, qu’elles font obstacle à toute distinction en fonction de l’origine de l’absence du travailleur en congé de maladie, dûment prescrit pour l’application du principe selon lequel tout travailleur, qu’il ait été mis en congé de maladie à la suite d’un accident survenu sur le lieu du travail ou ailleurs, ou à la suite d’une maladie de quelque nature ou origine qu’elle soit, a droit à un congé annuel payé d’au moins quatre semaines ;

Aux termes de l’article L 3141-3 du code du travail : « Le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. / La durée totale du congé exigible ne peut excéder trente jours ouvrables.»

Aux termes de l’article L 3141-5 du même code, les périodes pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d’accident de travail ou de maladie d’origine non professionnelle ne sont pas considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination du droit congé annuel ; que ces dispositions sont, dès lors, incompatibles avec les stipulations citées plus haut du § 1 de l’article 7 de la directive 2003/88/CE en ce qu’elles font obstacle à ce qu’un salarié bénéficie d’au moins quatre semaines de congé annuel payé au titre d’une année qu’il a passée en tout ou partie en situation de congé maladie d’origine non professionnelle.

Ce défaut de transposition est susceptible d’engager la responsabilité de l’Etat.

Aux termes de l’article 288 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, « la directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre » 

Si tout justiciable peut se prévaloir des dispositions précises et inconditionnelles d’une directive, lorsque l’Etat n’a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires, une directive ne peut pas par elle-même créer d’obligations dans le chef d’un particulier et ne peut donc être invoquée en tant que telle à son encontre ; qu’il suit de là qu’un salarié ne peut exiger d’un employeur privé de lui accorder le bénéfice de dispositions d’une directive non transposée.

Il n’en va autrement que si l’employeur est une autorité publique ou une personne privée chargée d’une mission de service public et dont l’activité est soumise à un régime exorbitant du droit commun.

Il suit de ce qui précède qu’alors qu’un salarié peut se prévaloir des stipulations de l’article 7 de la directive 2003/88/CE précitées relatives au congé annuel, ces stipulations, du fait de l’absence de leur transposition dans le droit national, n’ont pu faire naître aucune obligation à l’endroit de son employeur, personne morale de droit privé.

Ainsi, un salarié ne peut exiger de son employeur, de porter à quatre semaines le total de ses congés annuels, malgré les périodes pendant lesquelles il a été en arrêt de travail en raison d’un maladie d’origine non professionnelle, conformément à l’article 7 de la directive 2003/88/CE précitée.

La réduction des droits à congé d’un salarié à une durée inférieure à quatre semaines lui crée un préjudice dont l’absence de transposition de la directive 2003/88/CE est directement à l’origine.

Par suite, le requérant, ainsi dépourvu de toute chance sérieuse d’obtenir le rétablissement de son droit à congé annuel par les juridictions judiciaires, est fondé à demander à engager la responsabilité de l’Etat du fait de l’inconventionnalité de l’article L 3141-5 du code du travail.

Le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand[2] a considéré qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le salarié a droit à la réparation du préjudice équivalent à la perte de jours de congés payés correspondant à la différence entre la période minimale de congé annuel prévue par la directive 2003/88/CE et le nombre de jours de congé annuel que son employeur lui a effectivement accordés (soit, dans les circonstances de l’espèce, la perte de 6,5 jours de congé)

[1] Cour administrative d’appel de Versailles – Formation plénière 17 juillet 2023 / n° 22VE00442

[2] TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE CLERMONT-FERRAND, statuant au contentieux Lecture du 6  avril 2016, (audience du 22 mars 2016) n° 1500608




Eric ROCHEBLAVE – Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale

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