La CPAM n’a pas le droit d’utiliser de méthodes de vérifications par échantillonnage ou extrapolation pour réclamer des indus aux professionnels de santé

 

La procédure de recouvrement de l’indu obéit aux dispositions de l’article L 133-4 du code de la sécurité sociale et suppose que le contrôle à l’issue duquel l’indu a pu être déterminé ait été opéré sur des bases réelles, dossier par dossier, pour des actes et des montants clairement identifiés[1].

L’indu ne correspond pas à l’indemnisation d’un préjudice, mais repose sur des données et un chiffrage objectif[2].

 

A lire :
Notification d’indus CPAM : Défense des professionnels de santé




 

L’article L. 133-4 du Code de sécurité sociale dispose :

« I.-A.-En cas d’inobservation des règles de tarification, de distribution ou de facturation :

1° Des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7L. 162-17L. 165-1L. 162-22-7L. 162-22-7-3 et L. 162-23-6 ou relevant des dispositions des articles L. 162-16-5-1, L. 162-16-5-2L. 162-17-2-1, L. 162-18-1, L. 162-22-6L. 162-23-1 et L. 165-1-5 ou des activités de télésurveillance médicale figurant sur la liste mentionnée à l’article L. 162-52 ;

2° Des frais de transports mentionnés aux articles L. 160-8 et L. 160-9-1,

l’organisme de prise en charge recouvre l’indu correspondant auprès du professionnel, du distributeur ou de l’établissement à l’origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l’assuré, à un autre professionnel de santé, à un distributeur ou à un établissement. En contrepartie des frais de gestion qu’il engage lorsque l’inobservation des règles constatée est constitutive d’une fraude du professionnel, du distributeur ou de l’établissement, l’organisme d’assurance maladie recouvre auprès de ce dernier une indemnité équivalant à 10 % des sommes réclamées au titre des remboursements intervenus à tort. Cette indemnité est recouvrée dans les mêmes conditions que les indus recouvrés au titre du présent article.

B.-Il en est de même en cas de facturation en vue du remboursement, par les organismes d’assurance maladie, d’un acte non effectué ou de prestations et produits non délivrés ou lorsque ces actes sont effectués ou ces prestations et produits délivrés alors que le professionnel fait l’objet d’une interdiction d’exercer son activité libérale dans les conditions prévues au III de l’article L. 641-9 du code de commerce.

II.-L’indu mentionné au A du I peut, lorsque l’inobservation de ces règles est révélée par l’analyse d’une partie de l’activité du professionnel, du distributeur ou de l’établissement, être fixé forfaitairement, par extrapolation à tout ou partie de l’activité donnant lieu à prise en charge de l’assurance maladie, à l’issue d’une procédure contradictoire entre l’organisme d’assurance maladie chargé du recouvrement de l’indu et ce professionnel, ce distributeur ou cet établissement.

Lorsque la somme fixée en application du premier alinéa du présent II recueille l’accord écrit du professionnel, du distributeur ou de l’établissement, son montant est opposable aux deux parties.

III.-Lorsque le professionnel ou l’établissement faisant l’objet de la notification d’indu est également débiteur à l’égard de l’assuré ou de son organisme complémentaire, l’organisme de prise en charge peut récupérer la totalité de l’indu. Il restitue à l’assuré et, le cas échéant, à son organisme complémentaire les montants qu’ils ont versés à tort.

Lorsque l’action en recouvrement porte sur une activité d’hospitalisation à domicile facturée par un établissement de santé mentionné à l’article L. 6125-2 du code de la santé publique, l’indu notifié par l’organisme de prise en charge est minoré d’une somme égale à un pourcentage des prestations facturées par l’établissement. Ce pourcentage est fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

L’action en recouvrement, qui se prescrit par trois ans, sauf en cas de fraude, à compter de la date de paiement de la somme indue, s’ouvre par l’envoi au professionnel ou à l’établissement d’une notification de payer le montant réclamé ou de produire, le cas échéant, leurs observations.

Si le professionnel ou l’établissement n’a ni payé le montant réclamé, ni produit d’observations et sous réserve qu’il n’en conteste pas le caractère indu, l’organisme de prise en charge peut récupérer ce montant par retenue sur les versements de toute nature à venir.

En cas de rejet total ou partiel des observations de l’intéressé, le directeur de l’organisme d’assurance maladie adresse, par lettre recommandée, une mise en demeure à l’intéressé de payer dans le délai d’un mois. La mise en demeure ne peut concerner que des sommes portées sur la notification.

Lorsque la mise en demeure reste sans effet, le directeur de l’organisme peut délivrer une contrainte qui, à défaut d’opposition du débiteur devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l’article L. 211-16 du code de l’organisation judiciaire, comporte tous les effets d’un jugement et confère notamment le bénéfice de l’hypothèque judiciaire. Une majoration de 10 % est applicable aux sommes réclamées qui n’ont pas été réglées aux dates d’exigibilité mentionnées dans la mise en demeure. Cette majoration peut faire l’objet d’une remise.

IV.-Un décret en Conseil d’Etat définit les modalités d’application du présent article. »

 

Aux termes de l’article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale,

« les agents chargés du contrôle peuvent proposer à la personne contrôlée d’utiliser les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. »

 

L’article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale, qui ne concerne que les contrôles effectués en application de l’article L. 243-7 du code de la sécurité sociale, ne s’applique pas aux indus réclamés par les caisses, en cas d’inobservation des règles de tarification et de facturation, sur le fondement de l’article L. 133-4[3].

Les factures doivent être étudiées de façon exhaustive sans échantillonnage[4]

La Cour de cassation n’a nullement « validé le calcul d’indus par méthode d’extrapolation » et les considérations de la Caisse selon lesquelles « dans le cadre du contrôle de l’activité des professionnels de santé, il conviendrait de contrôler l’exhaustivité des soins pratiqués pour en connaître le préjudice strictement exact, cela s’avère impossible à réaliser faute de moyens humains au regard du volume de facturations » ne peuvent être admises, s’agissant d’une répétition d’un indu il appartient à celui qui se prétend créancier d’établir le caractère indu du paiement[5].

Pour une société exerçant une activité de transport médical, s’agissant de la méthode d’extrapolation utilisée par la caisse, elle ne peut être validée, dès lors qu’il appartient à la caisse d’établir la réalité de l’indu en contrôlant chaque transport. L’indu ne correspond pas à l’indemnisation d’un préjudice mais doit reposer sur des données et un chiffrage objectif[6].

Pour établir l’indu d’un masseur kinésithérapeute, la caisse a produit un tableau d’anomalies constitué, selon ses propres dires, à partir d’un échantillon aléatoire de cinquante patients. Le tableau en cause précise l’identité de l’assuré, le numéro du prescripteur, la date de prescription, la date de l’acte, la cotation appliquée, la cotation justifiée, la date de mandatement, le montant remboursé, le montant justifié, le montant de l’indu, les numéros de lot et de facture. Cependant, il ne vise que dix assurés, et non les cinquante annoncés par la caisse dans la notification de payer. L’extrapolation à laquelle la caisse a procédé, à partir d’un échantillonnage qu’elle a elle même établi, et qui n’est pas soumis au débat contradictoire puisque les noms des quarante autres assurés ne sont pas connus, n’est pas probante et ne peut en aucun cas démontrer le bien fondé de la totalité de l’indu réclamé. Elle aboutit, au surplus, à une évaluation approximative des sommes dont l’intéressé serait redevable[7].

 

 

[1] Cour d’appel de Rennes – 9ème Ch Sécurité Sociale 25 janvier 2023 n° 20/04671

[2] Cour d’appel de Versailles – ch. 05 9 décembre 2021 n° 20/02576

[3] Cour d’appel de Versailles – 5e Chambre 9 mars 2023 n° 21/02090

[4] Cour d’appel de Poitiers – Chambre sociale 23 juin 2022 n° 19/03983

[5] Cour d’appel de de Riom – ch. civile 04 SOCIALE 18 septembre 2018 n° 17/02616

[6] Cour d’appel de Rennes – 9ème Ch Sécurité Sociale 25 janvier 2023 n° 20/04671

[7] Cour d’appel de Versailles – ch. 05 9 décembre 2021  n° 20/02576

 




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Eric ROCHEBLAVE – Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale

 Eric ROCHEBLAVE
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Avocat Montpellier Eric ROCHEBLAVE

Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
https://www.rocheblave.com/

Lauréat de l’Ordre des Avocats
du Barreau de Montpellier

Lauréat de la Faculté
de Droit de Montpellier

DESS Droit et Pratiques des Relations de Travail
DEA Droit Privé Fondamental
DU d’Études Judiciaires
DU de Sciences Criminelles
DU d’Informatique Juridique

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