Travail dissimulé : peut-on se défendre en invoquant une entraide amicale ou un bénévolat ?

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Il résulte des dispositions de l’article L311-2 du code de la sécurité sociale que toute personne, quelle que soit sa nationalité, de l’un ou de l’autre sexe, salariée ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de sa rémunération, la forme, la nature ou la validité de son contrat, est affiliée obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit son âge et même si elle est titulaire d’une pension.

A défaut, il y a dissimulation d’emploi et l’organisme de recouvrement des cotisations sociales est fondé à procéder à une régularisation des cotisations et contributions à la charge de l’employeur.

La dissimulation d’emploi salarié prévue par l’article L. 8221-5 du code du travail est caractérisée notamment s’il est établi que l’employeur, de manière intentionnelle, s’est soustrait à la déclaration préalable d’embauche ou à la délivrance de bulletins de paie.

Toutefois, les personnes agissant dans le cadre d’une entraide amicale ou le bénévolat ne sont pas concernées par l’obligation d’affiliation.

Cour d’appel, Riom, 4e chambre civile, 31 Mai 2016 – n° 14/03034
Cour d’appel, Riom, 4e chambre civile, 5 Avril 2016 – n° 14/02037

Qu’est-ce que l’entraide amicale ?

L’entraide amicale se caractérise par une aide ou assistance apportée à une personne proche de manière occasionnelle et spontanée en dehors de toute rémunération et de toute contrainte.

Cour d’appel, Montpellier, 4e chambre sociale B, 12 Juin 2019 – n° 15/02253
Cour d’appel, Grenoble, Chambre sociale, 19 Mars 2019 – n° 18/01097
Cour d’appel, Douai, Chambre sociale, 28 Septembre 2018 – n° 16/01506
Cour d’appel, Riom, 4e chambre civile, 5 Avril 2016 – n° 14/02037
Cour d’appel, Besançon, Chambre sociale, 27 Février 2015 – n° 13/01841

La notion d’entraide amicale résulte d’une aide ponctuelle et bénévole qui ne saurait s’apparenter à la fourniture d’un travail salarié. Elle doit rester tout à fait ponctuelle et exceptionnelle

Cour d’appel, Nîmes, Chambre sociale, 14 Octobre 2014 – n° 13/05801

L’entraide ne doit pas être régulière, ni importante, ni nécessaire à la marche de l’entreprise.

Cour d’appel, Rennes, 9e chambre, 20 Février 2013 – n° 12/01698

Qu’est-ce que l’entraide bénévole ou bénévolat ?

Le bénévolat se définit comme l’aide apportée de manière spontanée et désintéressée au profit d’organismes sans but lucratif.

Cour d’appel, Besançon, Chambre sociale, 27 Février 2015 – n° 13/01841

Si aucun texte n’interdit en soi dans le secteur concurrentiel et marchand le bénévolat, ce dernier, par son but lucratif et par le fait qu’il s’exerce en dehors du temps professionnel, ne permet pas en principe de constituer le moyen de pourvoir des postes nécessaires à la réalisation de l’objet social d’une entreprise commerciale, sauf à l’admettre de façon tout à fait exceptionnelle.

Quand l’activité dite bénévole devient régulière et importante, sa fréquence et sa nature sont susceptibles, et plus particulièrement au sein d’une société commerciale, de créer l’apparence d’un contrat de travail et corrélativement une présomption de travail dissimulé qu’il incombe à la partie prise en qualité d’employeur de combattre.

Cour d’appel, Reims, Chambre sociale, 28 Novembre 2018 – n° 17/02421

Le bénévolat ne se conçoit nullement dans une entreprise commerciale.

Cour d’appel, Angers, Chambre sociale, 6 Septembre 2018 – n° 15/03534

Aucune entraide bénévole ne peut être admise au bénéfice d’une société commerciale

Cour d’appel, Lyon, 10 Décembre 2019 – n° 18/06954

Le bénévolat n’est pas autorisé dans une structure à vocation lucrative.

Cour d’appel, Dijon, Chambre sociale, 31 Janvier 2019 – n° 17/00484

Pour être qualifié d’entraide bénévole, le travail effectué doit ne pas être permanent, être non planifié et non indispensable à la mise en valeur de l’exploitation.

Cour d’appel, Bordeaux, Chambre sociale, 6 Décembre 2018 – n° 16/02792

La seule signature d’un contrat dit de bénévolat entre une association et une personne n’ayant pas la qualité de sociétaire n’exclut pas l’existence d’un contrat de travail, dès l’instant que les critères de ce dernier (prestation de travail, lien de subordination, rémunération) sont réunis.

Cour d’appel, Bordeaux, Chambre sociale, section A, 25 Septembre 2019 – n° 17/00782

Qui doit prouver l’entraide amicale ou le bénévolat ?

L’existence d’un travail dissimulé ne saurait se présumer à partir de la seule matérialité d’une action de travail pas plus qu’il n’appartient à la personne contrôlée de prouver l’absence d’une telle infraction.

Cour d’appel, Bastia, Chambre sociale, 18 Décembre 2013 – n° 13/00053

L’entraide amicale est présumée et il appartient à celui qui entend renverser cette présomption de démontrer l’existence d’une relation salariale caractérisée par une prestation de travail, un lien de subordination ou à tout le moins un travail dans un cadre organisé par l’employeur, lequel dispose du pouvoir de donner des directives et d’en contrôler l’exécution, assorti de celui de sanctionner, et une rémunération.

Cour d’appel, Douai, Chambre sociale, 28 Septembre 2018 – n° 16/01506

Eric ROCHEBLAVE
Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
https://www.rocheblave.com/