Un employeur peut contester de taux prévisible d’IPP de 25 % de prise en charge d’une maladie hors tableaux

Au soutien de leur demande tendant à l’inopposabilité des décisions de prise en charge des maladies hors tableaux, les employeurs peuvent contester les taux d’incapacités prévisibles alloués.

L’évaluation du taux d’incapacité permanente prévisible constitue une condition préalable à la saisine du CRRMP et, par conséquent, l’une des conditions médicales de la prise en charge de la maladie.

Les employeurs disposent, en conséquence, d’un intérêt à agir à contester la décision de prise en charge de la maladie en cause à travers le taux d’incapacité permanente prévisible fixé par le médecin conseil et il appartient bien à la caisse d’établir que cette condition d’un taux prévisible d’au moins 25% est satisfaite.




L’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale dispose :

« Les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d’origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles, est assimilée à la date de l’accident :

1° La date de la première constatation médicale de la maladie ;


2° Lorsqu’elle est postérieure, la date qui précède de deux années la déclaration de maladie professionnelle mentionnée au premier alinéa de l’article L. 461-5 ;


3° Pour l’application des règles de prescription de l’article L. 431-2, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle.

Est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d’exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d’origine professionnelle lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Peut être également reconnue d’origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu’il est établi qu’elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux évalué dans les conditions mentionnées à l’article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l’origine professionnelle de la maladie après avis motivé d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L’avis du comité s’impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l’article L. 315-1.

Les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d’origine professionnelle, dans les conditions prévues aux septième et avant-dernier alinéas du présent article. Les modalités spécifiques de traitement de ces dossiers sont fixées par voie réglementaire. »

La charge de la preuve de la réunion des conditions exigées par l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale pèse sur l’organisme social lorsque ce dernier a décidé d’une prise en charge[1].

Selon l’article L. 461-1, alinéa 4,  peut être également reconnue d’origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau des maladies professionnelles lorsqu’il est établi qu’elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle ci ou une incapacité permanente d’un taux évalué dans les conditions mentionnées à l’article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage fixé à 25 % par l’article R. 461-8.

Selon l’article D. 461-30 du code de la sécurité sociale, la caisse primaire d’assurance maladie saisit le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles après avoir recueilli, notamment, le rapport du service du contrôle médical qui, aux termes du troisième, comprend, le cas échéant, le rapport d’évaluation du taux d’incapacité permanente partielle de la victime ; que pour l’application de ces dispositions, le taux d’incapacité permanente à retenir pour l’instruction d’une demande de prise en charge d’une maladie non désignée dans un tableau des maladies professionnelles est celui évalué par le service du contrôle médical dans le dossier constitué pour la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, et non le taux d’incapacité permanente partielle fixé après consolidation de l’état de la victime pour l’indemnisation des conséquences de la maladie.

En cas de contestation par l’employeur, à l’appui d’une demande d’inopposabilité d’une décision de prise en charge effectuée sur le fondement de l’alinéa 4 de l’article L.461-1, il appartient au juge d’apprécier, au vu des éléments du débat et notamment des avis des CRRMP, le lien direct et essentiel entre le travail et la maladie déclarée mais qu’il lui appartient au préalable de se prononcer, s’il est contesté, sur le taux d’incapacité permanente partielle prévisible de l’assuré et ce dans les conditions prévues par l’article L.434-2, l’existence d’un taux d’incapacité prévisible d’au moins 25’% qui constitue la condition préalable de saisine du CRRMP et une des conditions médicales de la prise en charge de la maladie[2].

Il résulte de la combinaison des articles L. 461-1 et R. 461-8 du code de la sécurité sociale que, peut être reconnue d’origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau des maladies professionnelles lorsqu’il est établi qu’elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux évalué dans les conditions mentionnées à l’article L. 434-2 du même code et au moins égal à un pourcentage fixé à 25 %.

Aux termes des dispositions de l’article du code précité, la caisse primaire d’assurance maladie saisit le CRRMP après avoir recueilli, notamment, le rapport du service du contrôle médical qui comprend, le cas échéant, le rapport d’évaluation du taux d’incapacité permanente partielle de la victime.

En application de ces dispositions, le taux d’incapacité permanente partielle à retenir pour l’instruction d’une demande de prise en charge d’une maladie non désignée dans un tableau des maladies professionnelles est celui évalué par le service du contrôle médical dans le dossier constitué pour la saisine du CRRMP, et non le taux d’incapacité fixé après la consolidation de l’état de la victime pour l’indemnisation des conséquences de la maladie.

Le CRRMP n’est saisi que de l’existence d’un lien direct et essentiel, et la vérification par lui du taux prévisible n’entre pas dans sa mission, le texte de l’article D. 461-30 du code de la sécurité sociale, dans sa version antérieure au décret du 23 avril 2019, rappelant qu’il appartient à la caisse, préalablement à la saisine, de « statuer le cas échéant sur l’incapacité permanente de la victime », ce dont il résulte qu’il ne rentre pas dans la mission du CRRMP de se prononcer sur le taux prévisible d’incapacité fixé par la caisse sur avis de son praticien-conseil.

Si l’employeur ne dispose pas d’un intérêt à agir en ce que l’évaluation du taux prévisible, permettant uniquement de justifier la transmission du dossier au CRRMP, ne produit aucun effet à l’égard de l’employeur tant que le lien entre le travail et la pathologie de l’assurée n’a pas été établi par ledit comité, il convient de relever que l’évaluation dudit taux constitue toutefois une condition préalable à la saisine du CRRMP et, par conséquent, l’une des conditions médicales de la prise en charge de la maladie.

En conséquence, l’employeur dispose d’un intérêt à agir pour contester la décision de prise en charge de la pathologie professionnelle tant à travers le lien direct et essentiel avec le travail que par le taux d’incapacité permanente prévisible fixé par le praticien conseil, et il appartient à la caisse d’établir que cette condition d’un taux prévisible d’au moins 25 % est satisfaite[3].

Si la caisse ne produit aucun élément permettant de fonder son appréciation s’agissant du taux prévisible d’incapacité qu’elle a retenu et que le taux d’IPP de 25 % apparaît surévalué par rapport à la description qui est faite des troubles présentés par le salarié, il en résulte que le taux d’incapacité permanente prévisible de 25 % n’était pas atteint lors de la transmission du dossier au CRRMP.

Il convient dès lors de déclarer inopposable à l’égard de l’employeur la pathologie déclarée.

Il résulte de l’article L.461-1 précité du Code de la sécurité sociale que la preuve de ce que le taux d’incapacité prévisible du salarié est d’au moins 25%, dans la perspective de la saisine du CRRMP, peut être rapportée par l’avis du praticien conseil de la caisse mais à la condition que ce dernier soit fondé sur un élément extrinsèque[4]

Lorsqu’il n’est produit aux débats par la caisse aucun élément extrinsèque à l’avis du praticien conseil permettant de fonder l’appréciation de ce dernier quant au taux prévisible d’incapacité retenu par lui :

  • aux termes de l’article R.142-16 du Code de la sécurité sociale la juridiction peut ordonner toute mesure d’instruction, qui peut prendre la forme d’une consultation clinique ou sur pièces exécutée à l’audience, par un consultant avisé de sa mission par tous moyens, dans des conditions assurant la confidentialité en cas d’examen de la personne intéressée
  • aux termes de l’article R.142-16-4 à la demande de l’employeur, lorsque ce dernier est partie à l’instance dans les contentieux de nature médicale formés dans les matières mentionnées aux 1°,4°, 5° et 6° de l’article L.142-1, tout rapport de l’expert désigné ou du consultant est notifié au médecin qu’il mandate à cet effet. L’expert adresse son rapport médical intégral au greffe dans le délai imparti

Avant dire droit sur la contestation de la société relative au taux d’incapacité permanente prévisible et à la décision de prise en charge de la maladie déclarée, le Tribunal peut ordonner en application de l’article R.142-16 du Code de la sécurité sociale une mesure de consultation sur pièces pour mission de prendre connaissance des pièces figurant dans les dossiers remis à la Cour par les parties, de se faire remettre par le service médical de la caisse primaire d’assurance maladie en application de l’article R.142-16-3 du Code de la sécurité sociale l’intégralité du rapport médical mentionné à l’article L.142-6 du même Code justifiant la décision du praticien conseil de retenir un taux d’incapacité permanente partielle prévisible d’au moins 25’%, de donner son avis sur ce taux d’incapacité permanente partielle prévisible à la date à laquelle le praticien conseil s’est prononcé et d’adresser au greffe son rapport contenant cet avis dans le délai de quatre mois à compter de la réception du présent arrêt[5].

[1] Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 30 juin 2011, 10-20.148

[2] Cour d’appel d’Amiens 15 mars 2022 n° 19/06410

[3] Cour d’appel d’Amiens – 2eme protection sociale 7 novembre 2023 n° 20/04245

[4] Cass. 2e Civ., 21 octobre 2021 n° 19-24.237

Cass. 2e Civ., 21 octobre 2021, n° 20-13.946

Cass. 2e Civ., 7 novembre 2019, n° 18-21.742

[5] Cour d’appel d’Amiens 15 mars 2022 n° 19/06410




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Eric ROCHEBLAVE – Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale

 Eric ROCHEBLAVE
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Avocat Montpellier Eric ROCHEBLAVE

Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
https://www.rocheblave.com/

Lauréat de l’Ordre des Avocats
du Barreau de Montpellier

Lauréat de la Faculté
de Droit de Montpellier

DESS Droit et Pratiques des Relations de Travail
DEA Droit Privé Fondamental
DU d’Études Judiciaires
DU de Sciences Criminelles
DU d’Informatique Juridique

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