Licencier un salarié par mail est-il légal ?

L’article L1232-2 du code du travail dispose que « l’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable »

L’article L 1232-6 du Code du travail, précise que « Lorsque l’employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur.»

Un licenciement est donc subordonné à la convocation du salarié à un entretien préalable et à la notification par écrit des motifs du licenciement.

En dehors de la procédure légale de licenciement et en l’absence d’énonciation des motifs invoqués par l’employeur, le licenciement par mail est sans cause réelle et sérieuse

L’existence d’un licenciement de fait ou d’un licenciement verbal suppose de caractériser un acte ou un comportement de l’employeur manifestant de manière claire et non équivoque sa volonté de mettre un terme définitif au contrat, en dehors de la procédure légale de licenciement et en l’absence de l’énoncé par écrit des motifs de la rupture.

Il incombe au salarié qui invoque un licenciement de fait ou verbal d’en rapporter la preuve.

Cour d’appel de Nîmes, Chambre sociale, 8 Mars 2016 – n° 14/02168

Le mail d’un employeur peut caractériser de manière claire et non équivoque sa volonté de mettre un terme définitif au contrat, en dehors de la procédure légale de licenciement

Toutefois, la lecture de ce mail doit permettre cependant de retenir l’existence d’une rupture du contrat de travail

Cour d’appel de Chambéry, Chambre sociale, 29 Août 2019 – n° 18/01555

Le courriel invoqué doit refléter l’information certaine d’une rupture du contrat de travail décidé par l’employeur à l’encontre du salarié.

Cour d’appel d’ Aix-en-Provence, 9e chambre A, 16 Novembre 2018 – n° 16/07978

Le licenciement intervenu dans un mail, en dehors de la procédure légale de licenciement et en l’absence de l’énoncé des motifs du licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Cette rupture par mail du contrat de travail ouvre droit à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cour d’appel de Nîmes, Chambre sociale, 8 Mars 2016 – n° 14/02168

Le licenciement de fait ou verbal ayant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’examen du bienfondé des griefs allégués par l’employeur est sans objet.

Cour d’appel de Paris, Pôle 6, chambre 11, 23 Juin 2017 – n° 16/11295

Le licenciement de fait ou verbal ne peut être régularisé par l’engagement ultérieure de la procédure de licenciement.

Cour d’appel de Versailles, 11e chambre, 29 Octobre 2015 – n° 14/00739

 

En dehors de la procédure légale de licenciement mais avec énonciation des motifs invoqués par l’employeur, le licenciement par mail est irrégulier

Si le mail comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur à l’appui de la rupture du contrat de travail, sous le contrôle du juge prud’homal, le licenciement ainsi prononcé peut avoir une cause réelle et sérieuse.

En l’absence, en l’absence de convocation du salarié à un entretien préalable, le licenciement est « seulement » irrégulier.

L’article L1235-2 du Code du travail dispose :

« Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement prévue aux articles L. 1232-6, L. 1233-16 et L. 1233-42 peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans des délais et conditions fixés par décret en Conseil d’Etat.

La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs de licenciement.

A défaut pour le salarié d’avoir formé auprès de l’employeur une demande en application de l’alinéa premier, l’irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire.

En l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, le préjudice résultant du vice de motivation de la lettre de rupture est réparé par l’indemnité allouée conformément aux dispositions de l’article L. 1235-3.

Lorsqu’une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d’un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4, L. 1233-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée ou sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. »

Dans le cadre de la procédure légale de licenciement, la notification des motifs du licenciement par mail est régulière

La notification d’un licenciement doit être nécessairement écrite.

Cour d’appel, Chambéry, Chambre sociale, 29 Août 2019 – n° 18/01555.

Cependant, il est jugé que le non-respect de la formalité de lettre recommandée avec avis de réception n’invalide pas le licenciement.

Cour d’appel, Bordeaux, Chambre sociale, section A, 20 Novembre 2019 – n° 17/01881

L’envoi de la lettre recommandée avec avis de réception visée à l’article L. 1232-6 du code du travail n’est qu’un moyen légal de prévenir toute contestation sur la date de notification du licenciement

Cour de cassation, Chambre sociale, 31 Mai 2017 – n° 16-12.531

Il est jugé que la notification peut aussi résulter d’un acte délivré par huissier de justice ou par lettre remise en main propre au salarié.

Cour d’appel, Bordeaux, Chambre sociale, section A, 20 Novembre 2019 – n° 17/01881

Ainsi, à l’issue de la procédure de licenciement, c’est-à-dire après la convocation du salarié à l’entretien préalable, la notification des motifs du licenciement par mail est envisageable.

Eric ROCHEBLAVE
Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
https://www.rocheblave.com/