Votre indu CPAM est-il prescrit ?
Chaque année, de nombreux professionnels de santé reçoivent des notifications de remboursement d’indus émanant de la CPAM. Mais ces demandes sont-elles toujours juridiquement fondées ? La prescription peut, dans bien des cas, rendre ces actions de recouvrement irrecevables.
Qu’il s’agisse d’un indu notifié trois ou cinq ans après le paiement, ou d’une action engagée hors délai sans mise en demeure préalable, il est essentiel de connaître les règles de prescription applicables. Distinguer les situations sans fraude de celles entachées de dissimulation, identifier les actes interruptifs de prescription et comprendre les subtilités du contentieux du recouvrement : autant d’éléments déterminants pour défendre efficacement vos droits.
Le régime juridique de la prescription en matière de recouvrement d’indu
Selon l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale,
« (…) L'action en recouvrement, qui se prescrit par trois ans, sauf en cas de fraude, à compter de la date de paiement de la somme indue, s'ouvre par l'envoi au professionnel ou à l'établissement d'une notification de payer le montant réclamé ou de produire, le cas échéant, leurs observations. (…) »
Point de départ du délai de prescription
Hors fraude
Le point de départ de la prescription est la date du paiement de la somme faisant l'objet d'un indu[1].
Le point de départ n'est pas la date à laquelle la professionnelle de santé a facturé l'acte mais celle à laquelle la caisse a payé l'acte, la date du mandatement[2].
En cas de fraude
En matière de fraude, le point de départ de la prescription est retardé à la date à laquelle la caisse a eu connaissance de la fraude[3].
Durée du délai de prescription
Hors fraude
L'action se prescrit par trois ans[4].
En cas de fraude
En cas de fraude ou de fausse déclaration, toute action en restitution d'un indu engagée dans le délai de cinq ans à compter de la découverte de celle-ci, permet à la caisse de recouvrer la totalité de l'indu se rapportant à des prestations payées au cours des vingt ans ayant précédé l'action[5].
Interruption du délai de prescription par une demande en justice
Selon les articles 2241 et 2242 du code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion et l'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance.
La prescription comme fin de non-recevoir opposable à la caisse
La fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en recouvrement de la caisse d'un indu en l'absence de notification de mise en demeure et de l'absence de demande sollicitant la condamnation au paiement de celle-ci, est fondée sur le caractère extinctif de la prescription.
Notion de prescription extinctive
Selon l'article 2219 du code civil, la prescription extinctive est un mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps.
Les actes interruptifs de prescription dans le contentieux du recouvrement d’indu
Définition de la demande en justice interruptive de prescription
Il résulte de l'article 53 du code de procédure civile que la demande initiale est celle par laquelle un plaideur prend l'initiative d'un procès en soumettant au juge ses prétentions, et de l'article 64 du même code que constitue une demande reconventionnelle la demande par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire.
Limites de l’effet interruptif de prescription au bénéfice du défendeur
Seule constitue, pour le défendeur à une action, une demande en justice interrompant la prescription, celle par laquelle il prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire[6].
L'effet interruptif de la prescription ne peut bénéficier qu'à celui qui a réalisé l'acte interruptif[7].
Illustrations jurisprudentielles de l’irrecevabilité pour cause de prescription
La Cour d'appel de Versailles a jugé[8] :
« En l'espèce, la caisse a notifié l'indu le 9 septembre 2019 à la professionnelle de santé.
Aucune mise en demeure ne lui a été adressée et les premières conclusions en vue de la condamnation de la professionnelle de santé au paiement de l'indu sont postérieures au 9 septembre 2022, soit le 23 décembre 2022 selon la professionnelle de santé, date qui n'est pas contestée par la caisse.
En conséquence, la demande en restitution d'indu formée par la caisse est irrecevable comme prescrite. »
La Cour d'appel de Bastia a jugé [9]:
« Dans la situation sociale en cause d'appel, la cour constate que la notification d'indu du 29 août 2019 en litige porte intégralement sur des prestations réalisées par la SELARL [A] et mandatées par l'organisme de protection sociale entre le 4 avril 2017 et le 21 décembre 2018.
Ainsi la notification d'indu du 29 août 2019 ayant interrompu la prescription de chaque indu à cette date, le recouvrement de l'ensemble des paiements indus réclamés par l'organisme de protection sociale s'est prescrit le 29 août 2022, en l'absence de nouvelle démarche de recouvrement accomplie par la CPAM dans le précédent délai triennal. »
💼 Faites valoir vos droits face à la CPAM
Vous êtes professionnel de santé et la CPAM vous réclame le remboursement d’un indu ? Ne laissez pas passer les délais sans agir. Chaque situation mérite une analyse rigoureuse : prescription, absence de mise en demeure, irrégularités procédurales…
Prenez rendez-vous dès maintenant pour une consultation juridique personnalisée sur rocheblave.org et bénéficiez de l’accompagnement d’un avocat expérimenté dans les litiges CPAM.
[1] Cour d'appel d'Amiens - 2EME PROTECTION SOCIALE 23 avril 2025 / n° 23/00480
[2] Cour d'appel de Versailles - Ch.protection sociale 4-7 10 avril 2025 / n° 23/02468
[3] Cour d'appel d'Amiens - 2EME PROTECTION SOCIALE 23 avril 2025 / n° 23/00480
[4] Cour d'appel d'Amiens - 2EME PROTECTION SOCIALE 23 avril 2025 / n° 23/00480
[5] C.cass. ass.plén 17 mai 2023 pourvoi n° 20-20.559
[6] 2e Civ., 1er février 2018, n°17.14664, F-P+B
[7] 3e Civ., 4 novembre 2010, pourvoi n° 09-66.977, FS-P+B
[8] Cour d'appel de Versailles - Ch.protection sociale 4-7 10 avril 2025 / n° 23/02468
[9] Cour d'appel de Bastia - Chambre sociale TASS 19 février 2025 / n° 24/00061
Eric ROCHEBLAVE - Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale
Eric ROCHEBLAVE
PORTRAIT D'UN SPECIALISTE
Parcours, succès judiciaires, avis clients, revue de presse…
Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
https://www.rocheblave.com/
Lauréat de l’Ordre des Avocats
du Barreau de Montpellier
Lauréat de la Faculté
de Droit de Montpellier
DESS Droit et Pratiques des Relations de Travail
DEA Droit Privé Fondamental
DU d’Études Judiciaires
DU de Sciences Criminelles
DU d’Informatique Juridique
Vos avis sur Maître Eric ROCHEBLAVE