Comment les infirmières libérales et les infirmiers libéraux peuvent-ils se défendre face à un indu notifié par la CPAM ?

Les infirmières libérales et les infirmiers libéraux sont régulièrement confrontés à des notifications d’indu émanant de la CPAM. Ces demandes de remboursement de prestations supposément indûment versées reposent sur des règles strictes de facturation, de prescription médicale et de nomenclature des actes.

Mais quelles sont précisément ces règles ? Quelles sont les obligations de la CPAM ? Quels sont les droits des professionnels de santé ? Et surtout : comment contester efficacement un indu et se défendre devant la Commission de recours amiable ou le tribunal ?

Cet article fait le point, de façon claire et rigoureuse, sur les fondements juridiques du contentieux de l’indu, les voies de recours à mobiliser, et les moyens de preuve à opposer à la CPAM.




Qu’est-ce que le contentieux de l’indu des infirmières libérales et infirmiers libéraux ?

Il résulte des articles L. 133-4, L. 162-1-7 et L. 321-1 du code de la sécurité sociale, et de la NOMENCLATURE DES ACTES PROFESSIONNELS, annexée à l'arrêté du 27 mars 1972 modifié, que les actes de soins effectués par les infirmiers ne peuvent donner lieu à remboursement que dans les conditions fixées à ladite NOMENCLATURE DES ACTES PROFESSIONNELS, et que lorsque le versement d’une prestation en nature indue résulte de la NOMENCLATURE DES ACTES PROFESSIONNELS, l'organisme de sécurité sociale recouvre auprès du professionnel de santé l’indu correspondant.

L’objet du litige est donc de vérifier si les règles impératives de tarification et de facturation à l’assurance maladie ont été respectées par l’infirmière concernant les prestations objets de l’indu réclamé par la caisse.

Il ne s’agit nullement de remettre en cause la pertinence médicale et la qualité des actes réalisés par l’intéressée. La bonne foi invoquée est donc inopérante.

La NOMENCLATURE DES ACTES PROFESSIONNELS prévoit à l’article 5, c, de la première partie, que seuls peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d’assurance maladie, sous réserve que les personnes qui les exécutent soient en règle vis-à-vis des dispositions législatives, réglementaires et disciplinaires concernant l'exercice de leur profession, les actes effectués personnellement par un auxiliaire médical, sous réserve qu’ils aient fait l'objet d'une prescription médicale écrite qualitative et quantitative et qu'ils soient de sa compétence.

Par ailleurs, l’article R. 4312-42 du code de la santé publique énonce : « L’infirmier applique et respecte la prescription médicale qui, sauf urgence, est écrite, quantitative et qualitative, datée et signée. Il demande au prescripteur un complément d’information chaque fois qu'il le juge utile, notamment s’il estime être insuffisamment éclairé. Si l’infirmier a un doute sur la prescription, il la vérifie auprès de son auteur ou, en cas d'impossibilité, auprès d'un autre membre de la profession concernée. En cas d'impossibilité de vérification et de risques manifestes et imminents pour la santé du patient, il adopte, en vertu de ses compétences propres, l'attitude qui permet de préserver au mieux la santé du patient, et ne fait prendre à ce dernier aucun risque injustifié ».

Il s’ensuit que, sauf en cas d'impossibilité de vérification et de risques manifestes et imminents pour la santé du patient, dûment établis, les actes doivent être nécessairement réalisés sur la base d’une prescription médicale qui remplit avant ladite réalisation les critères de quantité et qualité précités.

Il est ensuite de jurisprudence constante que les termes de la NOMENCLATURE DES ACTES PROFESSIONNELS sont d’interprétation stricte.

Par ailleurs, le fait que la caisse accepte pour minorer l’indu des ordonnances ou certificats modifiés a posteriori ne peut constituer qu’une tolérance, qui n’est pas créatrice de droits.

En effet, la prise en charge étant subordonnée à la délivrance antérieure à la mise en œuvre de l’acte, le professionnel de santé ne peut se prévaloir de prescriptions médicales modifiées ou rééditées après la réalisation des actes en question ; et s’il peut être admis qu’un complément d’information se matérialise par une nouvelle prescription, voire une prescription médicale complémentaire, c’est à la condition que celle-ci soit établie avant l’engagement des soins.

La Cour de cassation a récemment précisé qu’il résultait des articles L. 161-33, alinéas 1 et 3, R. 161-47 et R. 161-48, I, du code de la sécurité sociale que lorsque le professionnel de santé n’avait pas transmis, dans les délais fixés par les deux derniers, les ordonnances correspondant aux feuilles de soin électroniques, l’organisme d’assurance maladie pouvait exiger de celui-ci la restitution de tout ou partie des prestations servies à l’assuré[1].

Il appartient donc au tribunal de vérifier, lorsque le professionnel de santé se prévaut d’une prescription répondant aux exigences de la nomenclature générale des actes professionnels au moment de la facturation, si cette prescription a bien été adressée par l’intéressé dans les délais requis.

Par ailleurs, le principe de la continuité des soins posé à l’article R. 4312-12 du code de la santé publique ne permet pas de déroger à l’obligation précitée. Un infirmier ne peut donc se prévaloir de ce principe pour justifier la facturation de soins sans prescription médicale préalable, écrite, qualitative et quantitative, sauf dans le cadre de l’article 4-1, I, de l’arrêté du 23 mars 2020 modifié (prescrivant les mesures d'organisation et de fonctionnement du système de santé nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire).

Au stade de la notification de l’indu, la CPAM n’a pas à produire aux infirmières libérales et infirmiers libéraux les ordonnances ni les factures

Selon la jurisprudence[2], la caisse établit la nature et le montant de l’indu par la production des tableaux, reprenant les numéros des bénéficiaires, les dates d’entrée et de sortie du dispositif, les noms des assurés, les dates de début et de fin des soins, les dates de mandatement, les numéros et noms des professionnels infirmiers, les actes, les honoraires, les bases de remboursement, les montants remboursés.

Il n’incombe pas à la caisse, au stade de la notification de l’indu, de produire les prescriptions médicales concernées, ni les factures émises, ni la preuve des paiements effectués[3].

Comment les infirmières libérales et infirmiers libéraux peuvent-ils contester un indu notifié par la CPAM ?

Saisir la Commission de Recours Amiable

Les infirmières libérales et infirmiers libéraux doivent saisir la commission de recours amiable avant l’expiration du délai légal de deux mois, suivant la notification de l’indu.

L’étendue de la saisine de la commission de recours amiable d’un organisme de sécurité sociale se détermine au regard du contenu de la lettre de réclamation[4].

La Cour de cassation juge que la commission de recours amiable est saisie de la contestation portant sur le bien-fondé d'un redressement même en l'absence de motivation de la réclamation[5].

Saisir le Pôle Social du Tribunal Judiciaire

La limitation de l’étendue du recours à la contestation soumise à la commission de recours amiable ne concerne que les demandes et non pas les moyens que le cotisant est susceptible de développer au soutien de sa contestation. Le cotisant peut invoquer devant la juridiction de sécurité sociale d’autres moyens que ceux soulevés devant la commission de recours amiable, tant qu’il n’en résulte pas une modification de l’objet du litige[6].

Comment les infirmières libérales et infirmiers libéraux peuvent-ils se défendre contre une notification de payer un indu par la CPAM ?

Les infirmières libérales et les infirmiers libéraux peuvent se défendre en discutant les éléments de preuves produits par la CPAM à l’appui de sa demande d’indu et apportez la preuve contraire.

Selon l'article 1315 du code civil auquel ne déroge pas l'article L133-4 du code de la sécurité sociale, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Suivant la jurisprudence[7], le régime de la preuve propre au contentieux du recouvrement de l'indu engagé par les organismes d'assurance maladie à l'encontre des professionnels et établissements de santé obéit aux principes directeurs suivants :

  • il incombe à l'organisme d'assurance maladie qui est à l'initiative de la demande d'indu de rapporter la preuve du bienfondé de sa demande, et plus précisément, du non-respect des règles de tarification et de facturation des actes, soins et prestations litigieux par le professionnel ou l'établissement de santé[8],
  • le professionnel ou l'établissement de santé peut discuter les éléments de preuve produits par l'organisme à l'appui de sa demande, pour lui d’apporter la preuve contraire[9]
  • il appartient enfin au juge du fond, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve soumis par les parties, de se prononcer sur le bienfondé, dans leur principe et dans leur montant, des sommes réclamées[10].

Dès lors que l'organisme social établit la nature et le montant de l’indu, il appartient au professionnel de santé de discuter les éléments de preuve produits et d'en apporter la preuve contraire[11].

Conformément à l’article 1358 du code civil, cette preuve peut être rapportée par tout moyen par le professionnel de santé tant lors des opérations de contrôle effectuées par les services de la caisse qu’à l’occasion de l'exercice des recours amiable et contentieux[12].

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Face à une notification de payer un indu par la CPAM, les infirmières libérales et infirmiers libéraux ne doivent pas rester seuls.

Une contestation efficace repose sur une analyse juridique rigoureuse de la nomenclature des actes, des prescriptions médicales, et des éléments de preuve produits.

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[1] 2e Civ., 17 octobre 2024, pourvoi n° 21-25.488

[2] 2e Civ., 23 janvier 2020, pourvoi n° 19-11.698

[3] Tribunal judiciaire de La Réunion - CTX PROTECTION SOCIALE 9 avril 2025 / n° 23/00163

[4] Civ. 2 12 mars 2020, pourvoi n° 19-13.422

[5] 2e Civ., 9 février 2017, pourvoi n° 16-12.242

[6] Civ 2, 24 septembre 2020, pourvoi n° 19.15070

[7] Cour d'appel de Nîmes - ch. Sociale 28 juillet 2020 / n° 18/01534

[8] 2 Civ., 16 décembre 2010, n° 09-17.188

[9] 2 Civ., 28 novembre 2013, n° 12-26.506

[10] 2 Civ., 7 octobre 2010, n° 09-16.661

[11] Tribunal judiciaire de La Réunion - CTX PROTECTION SOCIALE 9 avril 2025 / n° 23/00163

[12] 2e Civ., 25 avril 2024, pourvoi n° 22-11.613




Eric ROCHEBLAVE - Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale

 Eric ROCHEBLAVE
PORTRAIT D'UN SPECIALISTE
Parcours, succès judiciaires, avis clients, revue de presse…

Avocat Montpellier Eric ROCHEBLAVE

Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
https://www.rocheblave.com/

Lauréat de l’Ordre des Avocats
du Barreau de Montpellier

Lauréat de la Faculté
de Droit de Montpellier

DESS Droit et Pratiques des Relations de Travail
DEA Droit Privé Fondamental
DU d’Études Judiciaires
DU de Sciences Criminelles
DU d’Informatique Juridique

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