Qu’est-ce que le déficit fonctionnel permanent réparable en cas de faute inexcusable de l’employeur ?

L’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale dispose que lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitué dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles L. 452-2 et suivants du même code.

Aux termes de l’article L.452-3 du code de la sécurité sociale, « indépendamment de la majoration de rente qu’elle reçoit en vertu de l’article précédent, la victime a le droit de demander à l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d’agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. Si la victime est atteinte d’un taux d’incapacité permanente de 100 %, il lui est alloué, en outre, une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation. […]

La réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l’employeur ».

 

 




Selon la décision du Conseil constitutionnel en date du 18 juin 2010, en cas de faute inexcusable de l’employeur, la victime peut demander à celui-ci réparation de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.

En outre, par quatre arrêts rendus le 4 avril 2012, la Cour de cassation a précisé l’étendue de la réparation des préjudices due à la victime d’un accident du travail en cas de faute inexcusable de son employeur et a ainsi opéré une distinction entre les préjudices indemnisables car non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale et ceux qui ne le sont pas car déjà réparés au titre du livre IV.

La Cour de cassation, par deux arrêts[1] a décidé que la rente versée à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne répare pas le déficit fonctionnel permanent en sorte que la victime d’une faute inexcusable de l’employeur peut obtenir une réparation distincte du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées[2].

Le déficit fonctionnel permanent se définit ainsi :  » Il s’agit ici de réparer les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de la victime. Il convient d’indemniser, à ce titre, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, mais aussi la douleur permanente qu’elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence qu’elle rencontre au quotidien après sa consolidation. Ce poste de préjudice cherche à indemniser un préjudice extra-patrimonial découlant d’une incapacité constatée médicalement qui établit que le dommage subi a une incidence sur les fonctions du corps humain de la victime […] Il s’agit ici de réparer les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de la victime « .

 

Ce poste de préjudice a pour objet d’indemniser l’invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique, c’est-à-dire jusqu’à sa consolidation. Cette invalidité par nature temporaire est dégagée de toute incidence sur la rémunération professionnelle de la victime. Elle correspond à la perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, le préjudice temporaire d’agrément, éventuellement le préjudice sexuel temporaire. L’évaluation des troubles dans les conditions d’existence tient compte de la durée de l’incapacité temporaire, du taux de cette incapacité (totale ou partielle), des conditions plus ou moins pénibles de cette incapacité (séparation de la victime de son environnement familial et amical durant les hospitalisations, privation temporaire des activités privées ou des agréments auxquels se livre habituellement ou spécifiquement la victime, préjudice sexuel pendant la maladie traumatique) [3].

 

Il est manifeste que la Cour de Cassation a souhaité par son revirement de jurisprudence améliorer le sort des victimes puisque jusqu’alors elle jugeait que la rente prévue par le code de la sécurité sociale, versée aux victimes de maladie professionnelle ou d’accident du travail en cas de faute inexcusable de l’employeur, indemnisait tout à la fois la perte de gain professionnel, l’incapacité professionnelle et le déficit fonctionnel permanent (le handicap dont vont souffrir les victimes dans le déroulement de leur vie quotidienne) ce qui avait pour conséquence que pour obtenir de façon distincte une réparation de leurs souffrances physiques et morales, ces victimes devaient rapporter la preuve que leur préjudice n’était pas déjà indemnisé au titre de ce déficit fonctionnel permanent, preuve souvent difficile à apporter.

Désormais la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle peut, dans l’hypothèse d’une faute inexcusable de son employeur, solliciter une indemnisation de ses préjudices personnels sans bénéficier d’une double indemnisation.

En outre il convient d’ajouter que rien ne permet d’affirmer que le principe en vigueur avant le revirement de jurisprudence invoqué d’une indemnisation fixée de manière forfaitaire et non au regard du montant des préjudices en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle sans faute inexcusable de l’employeur, aurait été remis en cause.

En effet il résulte de l’article L451-1 du CSS qu’ » […] aucune action en réparation des accidents et maladies mentionnés par le présent livre ne peut être exercée conformément au droit commun, par la victime ou ses ayants-droit « , ce qui a pour contre-partie une réparation forfaitaire versée par l’assurance-maladie.

Ainsi, en cas d’AT/MP sans reconnaissance de faute inexcusable de l’employeur, le principe demeure celui de l’exclusion de la responsabilité de l’employeur et de l’indemnisation forfaitaire de la victime par l’organisme de sécurité sociale, telle que prévue par l’article L434-2 et le barème indicatif auquel il renvoie.

A cet égard en tout état de cause, il convient d’observer que l’article L434-2 du CSS tout comme le barème indicatif d’incapacité demeurent en vigueur et n’ont pas  » encore  » été abrogés consécutivement au revirement de jurisprudence de la Cour de cassation.

Il s’ensuit que n’ouvrent droit devant la juridiction des affaires de sécurité sociale à aucune autre action de la victime d’un accident du travail causé par une faute inexcusable commise par l’employeur les préjudices déjà réparés, même forfaitairement ou avec limitation. Les postes de préjudices suivants sont couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale :

– les dépenses de santé actuelles et futures (article L. 431-1, 1° et L. 432-1 à L. 432-4),

– les frais de déplacement (article L. 442-8),

– les dépenses d’expertise technique (article L. 442-8),

– les dépenses d’appareillage actuelles et futures (articles L. 431-1, 1° et L. 432-5),

– les incapacités temporaire et permanente (articles L. 431-1, L. 433-1, L. 434-2 et L. 434-15), la rente versée par la caisse indemnisant les pertes de gains professionnels et l’incidence professionnelle de l’incapacité,

– les pertes de gains professionnels actuelles et futures (articles L. 431-1, L. 433-1 et L. 434-2),

– l’assistance d’une tierce personne après la consolidation (article L. 434-2).

A contrario, une victime peut demander la réparation des préjudices prévus ou non par l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale :

– souffrances physiques et morales avant consolidation

– préjudice esthétique

– préjudice d’agrément

– préjudice professionnel (ex : perte de promotion, préjudice de carrière)

– déficit fonctionnel temporaire

– préjudice sexuel

– assistance temporaire par une tierce personne

– frais d’expertise médicale

– préjudice d’anxiété (réservé à l’amiante)

– le préjudice d’établissement consistant en la perte d’espoir et de chance normale de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité du handicap. L’évaluation est personnalisée notamment en fonction de l’âge. Le préjudice d’établissement ne peut être confondu, ni avec le préjudice d’agrément, ni avec le préjudice sexuel

– déficit fonctionnel permanent,

– les préjudices permanents exceptionnels permettant d’indemniser, à titre exceptionnel, tel ou tel préjudice extra patrimonial permanent particulier non indemnisable par un autre biais. Il a ainsi été précisé qu’il existait des préjudices extra patrimoniaux permanents qui prennent une résonance toute particulière soit en raison de la nature des victimes, soit en raison des circonstances ou de la nature de l’accident à l’origine du dommage.

[1] Ass. plén., 20 janvier 2023, pourvoi n° 21-23.947 et n°21-23.673

[2] Tribunal judiciaire de Lyon – CTX PROTECTION SOCIALE 15 février 2024 / n° 21/00024

[3] Tribunal judiciaire de Bobigny – Serv. contentieux social 6 février 2024 / n° 22/01322




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Eric ROCHEBLAVE – Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale

 Eric ROCHEBLAVE
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Avocat Montpellier Eric ROCHEBLAVE

Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
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Lauréat de l’Ordre des Avocats
du Barreau de Montpellier

Lauréat de la Faculté
de Droit de Montpellier

DESS Droit et Pratiques des Relations de Travail
DEA Droit Privé Fondamental
DU d’Études Judiciaires
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