Contrôle CPAM des infirmiers : comment contester les anomalies de facturation ?
💡 Un contrôle CPAM peut faire vaciller une carrière d’infirmier(e).
Parfois pour des montants qui dépassent plusieurs mois de revenus.
La caisse parle d’« anomalies de facturation » :
- absence de BSI,
- doubles facturations,
- AIS 3 requalifiés en AMI 1,
- prescriptions périmées ou surchargées,
- actes hors nomenclature (pilulier, instillation, contention…).
🎯 Mais un indu notifié par la CPAM n’est pas une fatalité.
Il existe des moyens juridiques concrets pour répondre, patient par patient, acte par acte, preuve à l’appui.
Je vois trop souvent des infirmier(e)s écrasé(e)s par la machine administrative alors qu’ils ont effectivement soigné, accompagné, maintenu l’autonomie de leurs patients.
En tant qu’avocat spécialiste en droit de la sécurité sociale, je défends chaque jour des professionnels de santé confrontés à ces procédures. Mon rôle : transformer le langage technique des notifications d’indu en une stratégie de défense claire, rigoureuse et efficace.
📌 Le présent article détaille des exemples de griefs de la CPAM et les axes de contestation possibles. 👉
Parce que derrière chaque indu, il y a plus qu’un chiffre : il y a un(e) infirmier(e), un cabinet, une vie professionnelle à protéger.
Les infirmiers libéraux sont régulièrement confrontés aux contrôles de la CPAM portant sur la facturation de leurs actes.
À l’issue de ces vérifications, l’Assurance Maladie peut notifier un indu, souvent élevé, en reprochant diverses anomalies : absence de BSI, doubles facturations, surfacturations, prescriptions irrégulières, actes hors nomenclature… etc.
Ces procédures, complexes et techniques, peuvent fragiliser économiquement un professionnel de santé.
Pourtant, il existe des moyens juridiques de contester un redressement et de défendre sa pratique.
En qualité d’avocat spécialiste en droit de la sécurité sociale, j’accompagne les infirmiers dans ces litiges face à la CPAM.
Facturations d’actes alors qu’aucun BSI initial ou de renouvellement n’ont été réalisés
Le Bilan de Soins Infirmiers constitue l'outil obligatoire d'évaluation pour la prise en charge des patients. L'absence de BSI initial ou de renouvellement compromet la validité de la facturation des forfaits BSA, BSB ou BSC.
Il résulte de l’articles 11 du Titre XVI de la nomenclature générale des actes professionnels relatifs aux soins infirmiers que pour la prise en charge d’un patient en situation de dépendance temporaire ou permanente, la cotation de certains actes par l’infirmier est subordonnée à l’élaboration préalable d’une Démarche de Soins Infirmiers (DSI) ou Bilan de soins infirmiers (BSI) [1], pouvant entraîner un contrôle a posteriori par l’Assurance Maladie[2].
Le bilan de soins infirmiers (BSI) permet à l'infirmier, à la suite d'une prescription de soins pour dépendance, de faire une évaluation de l'état de santé du patient dépendant afin d'établir un plan de soins infirmiers personnalisé (BSA, BSB, BSC)[3].
Le BSI est obligatoire depuis le 1er janvier 2020 pour les patients âgés de 90 ans et plus, remplaçant progressivement la démarche de soins infirmiers (DSI) dans le suivi à domicile des patients dépendants.[4]
Si les soins à domicile sont prescrits par le médecin, la Démarche de Soins Infirmiers – désormais Bilan de soins infirmiers (BSI) – est réalisée par les infirmiers eux-mêmes[5].
La cotation des séances de surveillance clinique infirmière et de prévention est subordonnée à l'élaboration préalable du bilan de soins infirmiers[6].
⚖️Conseils de Maître Eric Rocheblave :
Répondre patient par patient, acte par acte, en produisant la prescription médicale et, le cas échéant, le BSI saisi et validé.
En cas de difficulté technique (blocage AmeliPro ou logiciel), verser aux débats les preuves de saisie et de dysfonctionnement (captures, échanges avec la caisse ou l’éditeur).
Si un BSI est réellement absent, mettre en avant la réalité des soins dispensés et l’absence de manquement volontaire, afin de limiter ou d’écarter les pénalités financières.
Exiger la communication complète du dossier de contrôle (patients, dates, actes et liquidations) pour assurer le contradictoire.
Doubles facturations d’actes infirmiers
Lorsque la caisse justifie avoir annexé à la notification d’indu un tableau précis et détaillé qui reprend notamment les numéros des bénéficiaires, les noms, prénoms et numéros de sécurité sociale des assurés, les dates des prescriptions, les dates des soins, les actes côtés, la cotation proposée, l’indu calculé, de sorte que la nature et le montant de l’indu réclamé est suffisamment établi, il appartient à l’infirmière d’apporter des éléments sur chaque patient pour contester l’inobservation des règles de facturation et de tarification retenue par l’organisme de prise en charge au terme du contrôle[7].
L’infirmier doit indiquer quelles doubles facturations ayant généré un indu sont contestées et doit verser aux débats les prescriptions médicales correspondantes[8].
L’infirmière ne peut ainsi se contenter de suppositions concernant les pratiques des autres infirmiers[9].
Tenue de rapporter la preuve du respect des règles de facturation et de tarification applicables aux soins litigieux, l’infirmière ne fournit aucune explication au sujet des indus réclamés par la caisse procédant de doubles facturations, l’indu est donc établi[10].
Sur les doubles facturations, lorsque l’infirmière admet des erreurs informatiques, les indus de ce chef ne sont pas contestés[11].
L’indu est justifié lorsque l’infirmière ne démontre pas ses allégations relatives à l'existence d'une seconde présentation en raison d'un non-paiement de la première facture, la simple mention d'une nouvelle présentation ne signifiant pas que la première facture n'avait pas été réglée aux dates indiquées par la caisse[12].
⚖️Conseils de Maître Eric Rocheblave :
L’enjeu est de prouver l’absence de double paiement. Pour chaque paire d’actes visés (même patient/acte/date), versez ordonnances, FSE et surtout relevés NOÉMIE + historiques de télétransmission/annulation, établissant soit la réémission après rejet (une seule facture payée), soit la non-imputabilité (facturation par un autre professionnel : RPPS/Adeli distinct). Proscrivez les généralités : répondez ligne par ligne et exigez les données de liquidation des deux factures (références et dates de paiement). Si un vrai doublon payé deux fois est reconnu, l’indu est dû pour ces lignes, mais contestez le caractère fautif et la proportion des pénalités.
Surfacturations de soins infirmiers
La caisse fait valoir qu’un infirmier a facturé à tort des actes AIS 3 alors que les prescriptions litigieuses faisaient état de la surveillance d'une thérapeutique, justifiant une cotation AMI 1.
L'article 10 du chapitre I du Titre XVI de la NGAP prévoit que l'acte côté AMI 1 consiste en la surveillance et observation d'un patient lors de la mise en oeuvre d'un traitement ou lors de la modification de celui-ci avec établissement d'une fiche de surveillance, avec un maximum de quinze passages.
L'article 11 du chapitre I du Titre XVI de la NGAP définit les actes côtés AIS 3 comme l'ensemble des actions de soins liées aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie, visant à protéger, maintenir, restaurer ou compenser les capacités d'autonomie de la personne.
L’infirmier ne démontre pas que les actes qu'il a réalisés rentraient bien dans la catégorie des actions de soins liés aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie visant à compenser les capacités d'autonomie de la personne. Dès lors la demande de paiement d'indu est justifiée, les actes évoqués par l’infirmier relevant en réalité de la cotation AMI 1[13].
⚖️Conseils de Maître Eric Rocheblave :
L’infirmier doit démontrer que les soins réalisés concernaient bien des actions d’entretien et de continuité de la vie (aide à l’hygiène, mobilité, alimentation, dépendance), justifiant l’AIS 3.
Il faut produire les prescriptions médicales, le dossier infirmier et les fiches de surveillance pour prouver que le soin excédait la simple observation.
À défaut, contester la généralisation du redressement et limiter l’indu aux seuls actes requalifiables, en plaidant la bonne foi et l’absence d’intention de surfacturer.
Facturations d’actes non conformes à la prescription médicale (prescription surchargée, prescription périmée)
Prescription surchargée
Si l’infirmière n'est pas comme elle le soutient à l'origine de la surcharge portée sur la prescription, elle l'a toutefois utilisée au soutien de sa facturation, alors qu'il lui incombait en sa qualité de professionnelle de solliciter du médecin traitant qu'il établisse une prescription conforme, sans erreur de date et sans surcharge. Il n'est pas nécessaire d'établir que l’infirmière est à l'origine de la falsification pour lui reprocher d'avoir procédé à des facturations sur la base d'une prescription falsifiée[14].
Prescription périmée
L'article R 161-47 fixe les délais dans lesquels les prescriptions doivent être transmises par référence à R 161-42, ce qui suppose qu'elles soient produites au moment de l'envoi de la facturation des soins et du paiement des actes.
La facturation doit être opérée sur la base d'un dossier complet comprenant en particulier la prescription médicale justifiant les soins réalisés dont il est demandé le paiement ou le remboursement.
Ainsi la production de prescriptions rectificatives ou complémentaires obtenues auprès des médecins postérieurement au contrôle et établies postérieurement à la réalisation des soins sont inopérants et ne permettent pas de contredire les anomalies constatées de ce chef lors du contrôle.
Les duplicatas sont donc totalement dépourvus de caractère probant, mais surtout, dès lors que les soins ont été facturés à l'assurance maladie sur la base d'une prescription périmée, l'indu est justifié dans sa totalité[15].
⚖️Conseils de Maître Eric Rocheblave :
En cas de prescription surchargée, l’indu est retenu car l’infirmier devait exiger une ordonnance conforme ; seule défense possible : prouver que la surcharge est étrangère et que l’acte correspondait bien à la volonté médicale, afin de limiter les pénalités.
En cas de prescription périmée, la facturation est irrégulière ; il faut démontrer que les soins étaient effectivement prescrits et réalisés, contester la généralisation de l’indu et limiter le redressement à la période réellement non couverte, en insistant sur la bonne foi.
Facturations d’actes non pris en charge par l’assurance maladie
En vertu des dispositions de l'article L 162-1-7 du code de la sécurité sociale, la prise en charge ou le remboursement par l'assurance maladie de tout acte ou prestation réalisé par un professionnel de santé est subordonné à leur inscription sur une liste.
Constituent des actes hors nomenclature insusceptibles d'être pris en charge[16] par l'assurance maladie la pose de bas de contention, les soins par instillation de gouttes oculaires, la préparation d'un pilulier par un infirmier.
La préparation d'un pilulier[17] ou la préparation de médicaments ne fait pas l'objet de cotation dans la NGAP et ne peut dès lors être facturés à la caisse[18].
La préparation d'un pilulier pour la semaine, l'administration d'un traitement médicamenteux matin et soir, la gestion du traitement ou la préparation et la délivrance des médicaments ne sont pas des soins relevant de séances de soins infirmiers côtées AIS3[19].
L'article 1 des dispositions générales de la NGAP prévoit que les nomenclatures prises en application de l'article 7 du décret n° 60-451 du 12/05/1960 modifié établissent la liste, avec leur cotation, des actes professionnels que peuvent avoir à effectuer les médecins, et dans la limite de leur compétence, les chirurgiens-dentistes, sages-femmes et auxiliaires médicaux.
Ces nomenclatures s'imposent aux praticiens et auxiliaires médicaux pour communiquer aux organismes d'Assurance Maladie, tout en respectant le secret professionnel, et dans l'intérêt du malade, le type et la valeur des actes techniques effectués en vue du calcul par les organismes de leur participation.
L'article 11 du chapitre I du titre XVI de la NGAP qui concerne les soins infirmiers à domicile pour un patient, quel que soit son âge, en situation de dépendance temporaire ou permanente, l'acte coté AIS 3 mentionné au paragraphe II de cet article, est défini comme suit : séance de soins infirmiers, par séance d'une demi-heure, à raison de 4 au maximum par 24 heures. La séance de soins infirmiers comprend l'ensemble des actions de soins liées aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie, visant à protéger, maintenir, restaurer ou compenser les capacités d'autonomie de la personne. La cotation forfaitaire par séance inclut l'ensemble des actes relevant de la compétence de l'infirmier réalisés au cours de la séance, la tenue du dossier de soins et de la fiche de liaison éventuelle.
Il convient de rappeler qu'il est de jurisprudence constante que la NGAP est d'interprétation stricte.
Ainsi, l'application d'une crème est un acte hors nomenclature justifiant un indu[20].
⚖️Conseils de Maître Eric Rocheblave :
Les actes hors nomenclature (pilulier, instillation, contention, application de crème) ne sont pas remboursables, la NGAP étant d’interprétation stricte.
La défense consiste à vérifier si ces interventions étaient intégrées à une séance AIS 3 régulière (prise en charge globale d’un patient dépendant) et à l’établir par le dossier de soins ; sinon, l’indu est confirmé.
En tout état de cause, il faut contester la généralisation du redressement et mettre en avant la bonne foi pour limiter les pénalités financières.
Consultez un avocat en droit de la sécurité sociale par téléphone
Face à un contrôle CPAM et à une notification d’indu, chaque infirmier doit agir vite et avec méthode. La contestation exige une analyse précise de votre dossier, patient par patient, acte par acte. Ne restez pas seul face à l’Assurance Maladie.
👉 Maître Eric ROCHEBLAVE, avocat spécialiste en droit de la sécurité sociale, vous conseille et vous défend.
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[1] Cour d'appel d'Amiens, 2025-09-04, n° 23/01101
[2] Tribunal judiciaire de Meaux, 2025-08-11, n° 18/00031
[3] Tribunal judiciaire de Lille, 2024-05-13, n° 24/00110
[4] Tribunal judiciaire de Lille, 2025-01-07, n° 23/00308
[5] Tribunal judiciaire de Meaux, 2025-08-11, n° 18/00031
[6] Cour d'appel d'Amiens, 2025-01-17, n° 22/02721
[7] Tribunal judiciaire de Rennes, 2025-08-29, n° 22/00398
[8] Tribunal judiciaire de Bobigny, 2024-04-03, n° 22/01514
[9] Tribunal judiciaire de Rennes, 2025-08-29, n° 22/00398
[10] Cour d'appel d'Amiens, 2024-09-19, n° 23/03609
[11] Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2023-11-09, n° 21/16983
[12] Cour d'appel de Paris, 2023-06-09, n° 19/00003
[13] Cour d'appel de Bordeaux, 2024-12-05, n° 22/0461
[14] Cour d'appel de Nîmes, 2025-06-19, n° 24/01118
[15] Cour d'appel d'Amiens, 2025-05-26, n° 23/01050
[16] Cour d'appel d'Amiens, 2024-03-25, n° 21/04807
[17] Cour d'appel de Poitiers, 2023-07-27, n° 22/00419
[18] Cour d'appel de Nancy, 2023-06-27, n° 23/00196
[19] Cour d'appel d'Angers, 2023-02-28, n° 20/00097
[20] Cour d'appel de Nîmes, 2024-12-19, n° 23/03220
Eric ROCHEBLAVE - Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale
Eric ROCHEBLAVE
PORTRAIT D'UN SPECIALISTE
Parcours, succès judiciaires, avis clients, revue de presse…
Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
https://www.rocheblave.com/
Lauréat de l’Ordre des Avocats
du Barreau de Montpellier
Lauréat de la Faculté
de Droit de Montpellier
DESS Droit et Pratiques des Relations de Travail
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