Le temps de trajet ou de déplacement des salariés itinérants entre leur domicile et les premier et dernier clients doit être rémunéré comme un travail effectif

 

 

 




  

Aux termes de l’article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles.

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Aux termes de l’article L. 3121-4 du même code, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif. Toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière. Cette contrepartie est déterminée par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut, par décision unilatérale de l’employeur prise après consultation du comité d’entreprise ou des délégués du personnel, s’il en existe. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l’horaire de travail n’entraîne aucune perte de salaire.

La Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que l’article 2, point 1, de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail doit être interprété en ce sens que, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, dans lesquelles les travailleurs n’ont pas de lieu de travail fixe ou habituel, constitue du  »temps de travail », au sens de cette disposition, le temps de déplacement que ces travailleurs consacrent aux déplacements quotidiens entre leur domicile et les sites du premier et du dernier clients désignés par leur employeur (CJUE, 10 septembre 2015, Tyco, C-266/14).

Certes, ainsi que l’a énoncé l’arrêt précité (points 48 et 49), il résulte de la jurisprudence de la Cour que, exception faite de l’hypothèse particulière visée à l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2003/88/CE en matière de congé annuel payé, celle-ci se borne à réglementer certains aspects de l’aménagement du temps de travail, de telle sorte que, en principe, elle ne trouve pas à s’appliquer à la rémunération des travailleurs.

La Cour de justice considère en outre que la directive ne s’oppose pas à l’application d’une réglementation d’un État membre, d’une convention collective de travail ou d’une décision d’un employeur qui, aux fins de la rémunération d’un service, prend en compte de manière différente les périodes au cours desquelles des prestations de travail sont réellement effectuées et celles durant lesquelles aucun travail effectif n’est accompli, même lorsque ces périodes doivent être considérées, dans leur intégralité, comme du  »temps de travail » aux fins de l’application de ladite directive, Radiotelevizija Slovenija (Période d’astreinte dans un lieu reculé), C 344/19, point 58. (CJUE, 9 mars 2021, Stadt Offenbach am Main, C-580/19).

La Cour de cassation a jugé que le mode de rémunération des travailleurs dans une situation dans laquelle les travailleurs n’ont pas de lieu de travail fixe ou habituel et effectuent des déplacements quotidiens entre leur domicile et les sites du premier et du dernier clients désignés par leur employeur relève, non pas de ladite directive, mais des dispositions pertinentes du droit national et qu’en application de l’article L. 3121-4 du code du travail, le temps de déplacement qui dépasse le temps normal de trajet, qui n’est pas du temps de travail effectif, doit faire l’objet d’une contrepartie, soit sous forme de repos, soit sous forme financière (Soc., 30 mai 2018, pourvoi n° 16-20.634, Bull. 2018, V, n° 97).

Cependant, dans l’arrêt du 9 mars 2021 (Radiotelevizija Slovenija, C-344/19), la Cour de justice de l’Union européenne retient que les notions de « temps de travail » et de « période de repos » constituent des notions de droit de l’Union qu’il convient de définir selon des caractéristiques objectives, en se référant au système et à la finalité de la directive 2003/88/CE. En effet, seule une telle interprétation autonome est de nature à assurer à cette directive sa pleine efficacité ainsi qu’une application uniforme de ces notions dans l’ensemble des États membres (point 30). La Cour de justice de l’Union européenne précise que malgré la référence faite aux « législations et/ou pratiques nationales » à l’article 2 de la directive 2003/88/CE, les États membres ne sauraient déterminer unilatéralement la portée des notions de « temps de travail » et de « période de repos », en subordonnant à quelque condition ou restriction que ce soit le droit, reconnu directement aux travailleurs par cette directive, à ce que les périodes de travail et, corrélativement, celles de repos soient dûment prises en compte. Toute autre interprétation tiendrait en échec l’effet utile de la directive 2003/88/CE et méconnaîtrait sa finalité (point 31).

Eu égard à l’obligation d’interprétation des articles L. 3121-1 et L. 3121-4 du code du travail à la lumière de la directive 2003/88/CE, il y a donc lieu de juger désormais que, lorsque les temps de déplacements accomplis par un salarié itinérant entre son domicile et les sites des premier et dernier clients répondent à la définition du temps de travail effectif telle qu’elle est fixée par l’article L. 3121-1 du code du travail, ces temps ne relèvent pas du champ d’application de l’article L. 3121-4 du même code.

Ainsi, si pendant vos temps de trajet ou de déplacement entre votre domicile et les premier et dernier clients, vous devez vous tenir à la disposition de votre employeur et vous conformer à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles, ces temps doivent être intégrés dans votre temps de travail effectif et rémunérés comme tel[1].

 

[1] Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 novembre 2022, 20-21.924

 

 

 

 




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Eric ROCHEBLAVE – Avocat Spécialiste en Droit du Travail et Droit de la Sécurité Sociale

 Eric ROCHEBLAVE
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Avocat Montpellier Eric ROCHEBLAVE

Avocat Spécialiste en Droit du Travail
et Droit de la Sécurité Sociale
Barreau de Montpellier
https://www.rocheblave.com/

Lauréat de l’Ordre des Avocats
du Barreau de Montpellier

Lauréat de la Faculté
de Droit de Montpellier

DESS Droit et Pratiques des Relations de Travail
DEA Droit Privé Fondamental
DU d’Études Judiciaires
DU de Sciences Criminelles
DU d’Informatique Juridique

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